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Cashinvestigation sur France 2: ”La mise en scène d’Elise Lucet sur la place Saint-Pierre ressemble à une souricière ten
Cashinvestigation sur France 2: "La mise en scène d’Elise Lucet sur la place Saint-Pierre ressemble à une souricière tendue au pape"
Nous avons par ailleurs sollicité la réaction du journaliste Arnaud Bédat, qui connaît bien la vie argentine du pape François, ses proches et ses intimes, et qui vient de signer un nouveau livre le concernant aux éditions Flammarion, « François, seul contre tous ».
Nous l’avons interrogé sur les quelques minutes du reportage concernant le pape François dans le « Cash Investigation » consacré à la pédophilie dans l’Eglise.
« J’ai d’abord envie de dire que si toutes ces allégations contre le cardinal Bergoglio devenu pape François étaient réellement étayées, elles seraient sorties depuis bien longtemps.
A l’époque, le pouvoir argentin ne le ménageait pas, tous les coups étaient permis et avec la présidente Kirchner, les rapports étaient alors terriblement crispés. Si le pouvoir d’alors était persuadé que le cardinal Bergoglio avait couvert des crimes pédophiles, il ne se serait assurément pas privé de l’utiliser avant le Conclave de 2013, croyez-moi, c’est une évidence.
France 2, dans son commentaire utilise d’ailleurs très habilement le conditionnel concernant la prétendue implication de Bergoglio dans la couverture de crimes pédophiles. Ce conditionnel n’est pas un hasard. Je pense que la réalité des faits est beaucoup plus nuancée et qu’il faudrait au moins un reportage tout entier pour traiter ce volet-là ».
« Le cardinal Bergoglio a passé son temps en Argentine à dénoncer les mafias, la corruption, la traite des femmes, les maisons closes tenues par des réseaux mafieux, les trafiquants de drogue, l’économie qui tue, y compris à remettre de l’ordre dans ses troupes en dénonçant la mondanité du clergé, par exemple, etc. Rien dans sa vie passée ne permet en l’état de suspecter le fait qu’il ait couvert des abus sexuels.
Franchement, ça ne lui ressemble pas, ça ne ressemble pas à toute la conduite qu’il a eue durant toutes ses années passées à Buenos Aires. Il aurait fallu aussi diffuser quelques extraits des déclarations du pape François concernant la pédophilie : elles sont fortes marquées du sceau de la « tolérance zéro ». Ce qui me saute aux yeux instantanément, à mon sens, dans les quelques minutes à peine consacrées au pape dans « Cash Investigation », c’est la chronologie. Il y a un gros problème.
La fameuse citation brandie par « Cash Investigation » où le cardinal Bergoglio déclare que son diocèse n’a pas été confronté au problème de la pédophilie est extraite d’un livre d’entretiens avec le rabbin Skorka paru pour la première fois en espagnol en 2010 en Argentine, à très petit tirage, sur la base de rencontres qui se sont étalées sur des années. On n’a pas cherché à vérifier la date exacte de cette déclaration, par exemple en la demandant au rabbin Skorka lui-même, une personne qui répond toujours très aimablement aux questions qu’on lui pose.
La première condamnation de Grassi date de… 2010, ainsi que le dit lui même l’avocat des victimes, Juan Pablo Gallego, dans le reportage. On ne peut donc pas faire le procès à Bergoglio d’avoir menti ! Par ailleurs, cette citation est tronquée, extraite de son contexte. Il faut lire cette page 64 (de l’édition française) en intégralité, cette phrase, par exemple, très instructive, mais qui n’arrangeait guère la démonstration qu’on cherchait à en faire :
« Je ne crois pas comme certains qu’il faille maintenir un certain esprit de corporation pour préserver l’image de l’institution. Il me semble que cette solution a été proposée aux Etats-Unis : changer le curé de paroisse. C’est stupide parce que le curé emporte le problème avec lui. La réaction corporatiste mène à cela, c’est pourquoi je ne suis pas d’accord avec ce type de règlement ».
Dommage que France 2 n’ait pas été interroger non plus, par exemple, les journalistes Sergio Rubin ou Elisabetta Piqué, qui fréquentaient régulièrement le cardinal Bergoglio à cette époque-là pour avoir un contrepoint et une remise en perspective exacte de la situation et le contexte politique en Argentine ces années-là.
Enfin, parler avec le pape n’est pas une mission totalement impossible pour un journaliste qui a un peu d’obstination et de patience. On m’a dit que des équipes de France 2 avaient même déjà accompagné le pape dans des vols pontificaux par le passé, où il est très facile de l’interpeller. Cette mise en scène d’Elise Lucet sur la place Saint-Pierre ressemble à une souricière tendue au pape.
J'aime bien Elise Lucet et son émission, c'est une journaliste de talent et de flair, qui sait débusquer les affaires, mais là, franchement, je ne peux pas la suivre sur ce terrain-là.
C’est du spectacle, et j’ai un problème avec ça. Je suis prêt à entendre tout ce qu’on veut sur le pape François, mais il faut des preuves, des évidences, pas des rumeurs ou des constructions hasardeuses. Et là, il n’y a que de la mise en scène, très bien faite d’ailleurs, et des conditionnels à foison. Aucune attaque, décidément, n’est épargnée ces temps au pape François… plus que jamais seul contre tous »
Propos recueillis par Le Suisse Rom@in - Lien
lundi, 03 avril 2017 | Lien permanent
Cashinvestigation sur France 2: le Cardinal Bergoglio devenu le Pape François n'a pas couvert de prêtres pédophiles
Cashinvestigation sur France 2: le Cardinal Bergoglio devenu le Pape François n'a pas couvert de prêtres pédophiles
L'interview, mais est-ce une interview ! ?, du Pape François sur la place Saint-Pierre est non seulement ridicule mais relève de la faute professionnelle. Ces images d'évêques en France et de prêtres en caméra cachée, ces agressions style "chasse à l'homme " ne sont pas en faveur de la noblesse de la profession "journaliste d'investigation". (lien Antoine-Marie Izoard, Famille Chrétienne). Le Pape François a été très courtois en prenant même la peine de répondre.
Pour découvrir la vérité, il faut y mettre de l'élégance afin de la rendre crédible. Cette scène pourrait même compromettre la vérité que nous devons tous aux victimes. En ce sens, l'action de La Parole Libérée est providentielle. La fille de François Devaux, président de l'association, peut être très fière de son papa !
Tout d'abord, n'oublions pas qu'une opération d'intelligence orchestrée contre Bergoglio a été médiatisée peu avant le Conclave de 2005 par le gouvernement Kirchner. Le Père Bergoglio aurait mal agi pendant la dictature, notamment avec deux de ses confrères Jésuites. Arnaud Bédat, journaliste d'investigation suisse et fin connaisseur de Bergoglio en Argentine, a su démonter ce piège tendu par le gouvernement dès 2005 (interview, dès 4 minutes)
Les accusations sur la pédophilie contre le Cardinal Bergoglio datent plus ou moins de la même époque, après 2005 mais avant 2010. Avons-nous également à faire à une seconde opération d'intelligence ? Dirigée par qui ?
C'est à vérifier. Dans tous les cas, le gouvernement en place en 2005 n'aurait pas hésité une seule seconde à instrumentaliser cette affaire. Il ne l'a pas fait.
Pédophilie et Cashinvestigation: l'Eglise catholique ne craint jamais la vérité.
Le père Grassi a bel et bien été condamné par le justice civile "sous le règne" du Cardinal Bergoglio. N'oublions pas: c'est d'abord et avant tout l'évêque du lieu qui est responsable du Père Grassi, sous la tutelle de la Congrégation pour la doctrine de la foi, souveraine sur ces crimes depuis le Motu Proprio de Saint Jean-Paul II en 2001.
Il est tout à fait possible que le Cardinal Bergoglio, primat d'Argentine, ai cherché la vérité durant l'instruction, d'où un livre avec son nom. Et alors ? Est-ce un mal ? La procédure judiciaire cherche toujours à faire résonner les différents sons de cloches afin de juger avec droiture, en connaissance de cause.
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Cashinvestigation et le Pape François: le Père Grassi a été condamné en 2009 à 15 ans de prison pour abus sexuel aggravé d'un mineur en 2002, âgé de 19 ans.
Le journal argentin de La Nacion relève que l'évêque du Père Grassi a communiqué sur ce scandale. Le prêtre a été retiré de toute mission pastorale du diocèse. La sentence de prison a même été confirmée.
L'évêque de Morón publié sur son site une brève déclaration faisant référence à la situation juridique du père Julio César Grassi, condamné à 15 ans de prison pour « abus sexuels graves » contre un mineur à la Fondation Happy Children .
Dans la lettre, l'évêque a noté que « depuis le début du procès, le prêtre a été retiré de toute mission pastorale du diocèse » et que « la mesure est en vigueur pour le Père Grassi dictée par l'évêque de Moron, Mgr Luis Eichhorn, lui interdisant le ministère public ».
« À juste titre, le Saint-Siège a ordonné une enquête préliminaire sur les allégations de la conduite de ce prêtre, qui est venu à la connaissance de Rome par un rapport envoyé à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.
L'Évêché, selon les procédés canoniques existants à la disposition du Saint-Siège, a dûment et en temps voulu informer l'opinion publique ".
Le 21 mars 2017, le juge a rejeté à l'unanimité les recours introduits dans la cause attribuée au prêtre, validant la décision de la Cour suprême de la province de Buenos Aires.
Ainsi, la sentence est devenue un arrêt définitif de la Cour pénale n ° 1 de Morón, de la province de Buenos Aires . Elle a condamné Grassi à 15 ans de prison comme auteur des infractions répétées d'abus sexuel aggravé; le prêtre était responsable de l'éducation et de la garde de l'enfant victime.
Le prêtre a été condamné en 2009 à 15 ans de prison pour abus sexuel aggravé d'un mineur en 2002, âgé de 19 ans. La victime a témoigné dans un programme de télévision comment il avait été abusé par un prêtre quand il avait 15 ans. Il vivait dans le Happy Children Foundation, dont était responsable le père Grassi.
Cependant, le prêtre a connu une libération conditionnelle avant d'être arrêté en 2013. Après cette confirmation, il sera donc condamné à plus de douze ans de prison.
Le prêtre est actuellement hébergé à la prison de l'unité no. 41 de Campana, province de Buenos Aires.
mercredi, 22 mars 2017 | Lien permanent | Commentaires (3)
Les déçus du Pape François et la communication
Les déçus du Pape François et la communication: l'effet des stalagmites
Le Pape Benoît XVI avait eu droit à des polémiques médiatiques. Ces dernières fonctionnent un peu comme la formation de stalagmites, avec une cristallisation de slogans qui tournent en boucle et qui finissent, par le truchement de la répétition, comme des vérités figées.
Le Pape François subi un peu la même chose. Trois exemples:
La crise de l'ordre de Malte
- la crise de l'ordre de Malte. En fait, le Cardinal Burke n'a pas vraiment aidé ni le Pape, ni l'ordre de Malte. Le numéro un avait renvoyé le numéro trois, après une rencontre avec le Cardinal américain. Le Pape avait été troublé par une ancienne affaire de préservatifs. Une différence de sensibilité, disons traditionnelle et plus classique, l'avait emportée dans un premier temps.
Après enquête, le numéro un a été démis de ces fonctions et le Cardinal Burke a reçu une mission concernant une enquête canonique à l'autre bout du monde, sa spécialité. Le numéro trois fut réintégré et un commissaire pontifical a été nommé. La sensibilité traditionaliste n'a pas apprécié.
Le Pape n'a fait que son travail au service d'un ordre au service des plus pauvres. Mais tout finira bien.
Le piège de la guerre de religion
- après l'assassinat du Père Jacques Hamel, certains français n'ont pas aimé la phrase du Pape: "je n'aime pas parler de violence islamique, sinon je dois parler de violence catholique". L'extrémisme est une tentation humaine.
Or le Pape François n'a pas usé du vocable "islamiste". Ce dernier est clairement responsable du déclenchement de la violence. Comme leader mondial, François veut tout faire pour ne pas entrer dans une guerre de religion, un piège tendu justement par les islamistes. "Tuer au nom de Dieu est un blasphème" martèle le Pape.
La grande majorité des musulmans sont pacifiques, ce qui n'est pas le cas des salafistes, des extrémistes terroristes. La distinction entre "islamique" et "islamiste", "terroriste" est fondamentale. Le Père Hamel a parlé de Satan. C'est lui qui veut nous faire croire que le nom de Dieu est équivalent à "violence". Or, la religion, la conscience ou la spiritualité donnent la Paix, celle des coeurs, celle de la vie sociale.
Amoris Laetitia et l'aide de l'Eglise pour tous
- Une mauvaise lecture d'Amoris Laetitia, l'exhortation apostolique post-synodale sur le mariage, laisse à penser que le Pape a ouvert la porte à la communion, donc à la confession, des personnes divorcées remariées.
Très honnêtement, quelle est la citation qui affirme cela ? Il n'y en a aucune. Simplement, le Cardinal Kasper, qui a toujours vécu dans l'ombre de Cardinal Ratzinger, pense que François a entrepris une révolution copernicienne. A lire de plus près les textes, le Pape François a surtout approfondi la loi de la gradualité, afin d'accueillir, de discerner et d'intégrer les personnes dans une situation dite irrégulière.
Le texte magistériel dit précisément qu'il n'y a pas des personnes en règles et des personnes irrégulières. Nous sommes tous et toute à la même école de la Miséricorde. Pour aller communier, il y a également bien d'autres questions à poser également à notre conscience que ces deux situations de vie, le divorce et l'homosexualité. Cette stigmatisation, cette obsession sont offensantes et rigoristes.
Le fonctionnement médiatique est essentiellement basé sur la politique
En fait, le "frame" politique joue son jeu. Un frame est un cadre, un angle d'approche qui formate un débat. Par exemple, comme le Pape François développe la doctrine sociale de l'Eglise, sur l'économie, sur l'accueil des réfugiés et sur la pauvreté, le fonctionnement politique qui s'appuie sur ce frame décrit le Pape François comme un homme de gauche. La gauche s'occuperait d'avantage des questions sociales. Or, cette analyse ne tient pas. L'Eglise ne fait pas de politique. Sa source d'inspiration est l'Evangile.
La liberté et le responsabilité des hommes et des femmes politiques est engagée afin de chercher à orienter les grandes questions de notre monde selon ces principes moraux fondamentaux, ceux qui mettent la personne humaine au coeur de la politique. Le Pape appelle cela la grande politique.
Le basculement vers la contestation sur internet
Il est paradoxal que le "jeu médiatique" ai glissé des media mainstream vers les réseaux sociaux, comme Facebook ou Twitter, globalement sur internet. Lors du pontificat de Benoît XVI, les attaques provenaient des grands médias et internet était une source bienvenue d'information.
Avec François, un croisement s'est comme opéré. Ces grands médias traitent encore assez bien François (il est tout de même récupéré), alors que la contestation provient désormais de la sphère ou de la nébuleuse d'internet.
Pourtant, le Pape François ou le Pape Benoît XVI, c'est soutane blanche et blanche soutane.
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Les ennemis du Pape
(source Aleteia, René Pujol) Inutile de multiplier les citations. La focalisation médiatique excessive sur les oppositions internes à l’Église au pape François ne doit pas occulter le fait que ses ennemis les plus déterminés sont ailleurs. Ils se situent dans le monde de la finance internationale, au sein des lobbies du pétrole et de l’armement, ou encore parmi les gagnants – il y en a toujours – des tensions géopolitiques.
Tout comme la thèse d'Arnaud Bédat dans "François seul contre tous", il faut également lire, sur ces questions, le remarquable ouvrage de Nello Scavo. L’auteur y salue ce « chef d’œuvre de la diplomatie vaticane » que constitue le rétablissement des relations diplomatiques entre Cuba et les États-Unis ; il souligne la constance de l’opposition du Saint-Siège à une escalade anti-iranienne aujourd’hui renforcée par l’élection du président Trump.
Mais surtout, il démontre comment dans un monde multipolaire « Bergoglio est passé à l’action, faisant du Vatican une alternative valable aux organisations traditionnellement vouées à la résolution des conflits. Nations unies en tête. » Et comment « Les émissaires de François travaillent à la cessation des hostilités» dans nombre de conflits de la planète. » Ce qui dessert certains intérêts, y compris en France.
Avec cette conclusion qui vaut pour l’ensemble des oppositions actuelles au Pape : « Il est indéniable que plus les interventions de François sont décisives, plus le nombre de loups rejoignant la meute augmente ».
mardi, 14 mars 2017 | Lien permanent | Commentaires (15)
Le commandant de la Garde suisse Anrig s'en va, mais pour un renouveau
Le commandant de la Garde suisse s'en va pour donner de l'air frais
RTS - ATS
© Artymiak/GSP
Le 31 janvier, le cardinal secrétaire d’Etat Pietro Parolin a célébré une messe au cours de laquelle il a salué “l’exemple de responsabilité et de fidélité“ du commandant nommé en août 2008, évoquant longuement dans son homélie l’exemple d’autorité du Christ.
dimanche, 01 février 2015 | Lien permanent | Commentaires (1)
Pédophilie dans l'Eglise en France: le journaliste français René Poujol parle cash
Pédophilie dans l'Eglise en France: le journaliste français René Poujol parle cash
A lire: le Cardinal Bergoglio n'a pas couvert de prêtres pédophiles
A lire: Arnaud Bédat s'exprime sur le blog Le Suisse Rom@in
Décliner une invitation à débattre des «silences» de l’Eglise sur la pédophilie n’est pas la meilleure manière de se faire entendre.
Les téléspectateurs qui, le 21 mars, auront regardé jusqu’au bout l‘émission Cash investigation consacrée à la pédophilie dans l’Eglise, en auront ressenti une forme de sidération, une sourde colère.
Beaucoup se seront reconnus dans ce commentaire du père Olivier Ribadeau-Dumas, porte parole de la Conférence des évêques de France : « J’ai regardé l’émission Cash Investigation avec un sentiment de honte… Nous n’avons pas respecté les victimes…»
Quand la Cef fait le choix de la chaise vide
La Cef avait, les jours précédents, dans un communiqué, fait connaître sa décision de ne pas participer au débat qui suivrait le documentaire. «Ce refus de participer à cet enregistrement est motivé par les méthodes utilisées pour les interviews ainsi que par divers renseignements obtenus sur cette émission. Il apparaît que la déontologie journalistique ne soit pas respectée et que cette émission soit plus préoccupée d’accuser que d’expliquer.» Une position sur laquelle Vincent Neymon, directeur de la communication des évêques de France s’est expliqué par la suite sur KTO.
On connaît le parti pris d’Elise Lucet, d’interpeller publiquement, sous l’œil des caméras, des protagonistes ayant préalablement été sollicités par une demande formelle d’interview à laquelle ils ont choisi de ne pas donner suite. L’effet est spectaculaire et ravageur. La personne, déstabilisée, refuse généralement de répondre et tourne les talons, donnant le sentiment de fuir. Effet recherché et garanti ! Et lorsque c’est le pape François lui-même qui se trouve ainsi «sommé» de s’expliquer, sur la place Saint-Pierre, au milieu de la foule des pèlerins, sur ses complaisances supposées à l’égard d’un prêtre pédophile argentin, le spectateur ressent un réel malaise.
Comme s’il y avait là, de la part de la journaliste, une forme d’irrespect et d’abus de pouvoir. Cash investigation recourt également, à plusieurs reprises, à la technique de l’interview en caméra cachée où la personne interpellée ignore qu’elle est filmée et que tout ce qu’elle va dire, taire ou montrer par son attitude – en toute confiance – sera, de fait, retenu contre elle.
Quand la fin suggère les moyens…
On peut, bien sûr, plaider que la fin ne justifie pas les moyens. Mais ces techniques font mouche. Le journaliste, quelles que soient parfois ses velléités à jouer au justicier, sait qu’il tire une vraie légitimité du droit des citoyens à savoir. Et lorsque le téléspectateur a le sentiment que l’information ainsi extorquée, qui n’aurait pas été obtenue autrement, éclaire réellement le sujet abordé, toute objection de nature éthique sur les conditions de son obtention devient sans effet.
L’enquête de France 2 révèle, de même, le contenu de la lettre par laquelle un évêque Camerounais explique comment il a soustrait à la justice de son pays des religieux français de la communauté Saint-Jean soupçonnés de pédophilie. Le voir, face à la caméra, refuser de s’expliquer au motif que les journalistes n’étaient pas sensés avoir connaissance de cette lettre confidentielle a un effet dévastateur. Elargissons le propos : la société n’aurait pas à interpeller l’institution religieuse sur ce qu’elle entend garder secret.
Qu’on s’en réjouisse ou qu’on le déplore, il existe aujourd’hui sur ces questions une exigence de transparence dont une institution comme l’Eglise doit admettre qu’elle s’impose désormais à elle… définitivement !
Expliquer c’est aussi chercher à comprendre comment on a pu en arriver là
L’une des critiques possibles vis-à-vis de cette enquête est qu’elle entendrait démontrer que l’Eglise qui est en France, malgré ses engagements, devrait faire face à une nouvelle vague de faits de pédophilie, couverts par le silence de la hiérarchie, alors qu’il s’agit, pour l’essentiel, de faits anciens, connus pour la plupart. Mais reprocher à l’émission d’être «plus préoccupée d’accuser que d’expliquer» (1) est doublement inopérant. Sur la pédophilie dans l’Eglise il est clair que l’opinion, y compris au sein du monde catholique, attend une condamnation plus qu’une explication. Et si explication il doit y avoir, elle ne peut en aucun cas se limiter à la seule évocation des efforts engagés par l’institution pour combattre efficacement la pédophilie, même s’ils sont bien réels. Ni à affirmer qu’une page serait définitivement tournée… Expliquer c’est aussi chercher à comprendre comment on a pu en arriver là.
Trop de séquences de Cash investigation illustrent, à l’évidence, que l’Eglise est encore loin du compte et que l’on peut s’interroger sur la réalité de sa détermination ou de sa capacité à mettre en œuvre la «tolérance zéro».
«Celui par qui le scandale arrive» n’est pas la victime qui demande justice
Lorsque un responsable des Pères du Sacré Cœur estime n’avoir pas à signaler la présence d’un frère accusé de faits de pédophilie au motif que «C’est à la police de faire son travail», il contrevient d’évidence aux directives de Benoît XVI. Lorsque le même avoue au journaliste venu l’interroger : «Cette question sur les victimes, je ne me la suis posée qu’hier» on se dit qu’il y a encore du chemin à parcourir pour la prise de conscience, dans l’Eglise, de l’abomination du crime pédophile ; pour que chacun reconnaisse que «celui par qui le scandale arrive» n’est pas la victime qui porte plainte mais bien l’agresseur qui aurait préféré rester dans l’ombre ; et qu’il ne peut y avoir de miséricorde pour le pêcheur sans justice pour sa victime.
Lorsque, dans le débat, le président de la Parole libérée décrit ce qu’il perçoit comme incapacité de la hiérarchie catholique à accepter vraiment le dialogue avec les associations de victimes, on imagine, par-delà la souffrance des personnes, l’ébranlement de la confiance envers l’Eglise.
Dérives individuelles ou responsabilité collective ?
Lorsque Mgr Crépy souligne le fait que sa responsabilité à la tête de la commission permanente de lutte contre la pédophilie ne lui donne pour autant aucune autorité hiérarchique sur les évêques ; lorsqu’il affirme que, dans son diocèse, un religieux soupçonné de pédophilie ne dépend pas de lui mais du bon vouloir du supérieur de la congrégation à laquelle il appartient, il illustre parfaitement l’incapacité de l’Eglise à reconnaître que l’une des causes du drame pédophile puisse venir d’un dysfonctionnement de l’institution elle-même et non de seules dérives individuelles.
Lorsque le père Joulain, prêtre et thérapeute, consultant sur des centaines d’affaires de pédophilie, porte le diagnostic d’une «déconnection des évêques avec tout ce qui touche à la sexualité…», on se sent autorisé à interpeller, une nouvelle fois, l’Eglise sur sa théologie de la sexualité humaine.
«Il y faudra une génération»
Lorsque la responsable de l’ONU chargée en 2014 d’une enquête sur les abus sexuels dans l’Eglise déclare (2) : «Le Vatican nous a dit que c’était un problème du passé. Plus nous avançions, plus nous nous rendions compte que ce n‘était pas le cas.» on se dit que même au plus haut sommet de l’Eglise on peut prendre ses désirs pour des réalités. Et lorsqu’on entend les interrogations soulevées, non seulement par l’obstruction de la Curie aux décisions du pape François, mais également par les ambiguïtés du pape lui-même, on se dit qu’il est urgent que les fidèles continuent de se tenir en éveil.
Dans le documentaire de Cash investigation, le père Hans Zollner, membre de la Commission de protection des mineurs mis en place par le Vatican, déclare à Elise Lucet à propos du combat contre la pédophilie : «C’est le travail d’une génération». Comment mieux exprimer que si la détermination est aujourd’hui acquise de lutter contre ce crime , le processus d’éradication et de guérison sera long, sans doute douloureux, semé d’embuches ou de renoncements.
Ce chemin de croix, l’Eglise va devoir le parcourir sous le regard implacable de la société civile, trop heureuse – en certains lieux – de lui faire payer sa dénonciation de l’amoralisme contemporain. En oubliant, au besoin, que dans les années soixante-dix, les mêmes qui se sont institués procurateurs tenaient antenne ouverte à un militantisme pro-pédophile, au nom de l’émancipation de l’enfant et de son droit à une sexualité épanouie.
Pour une commission d’enquête parlementaire ?
Derrière ses excès mêmes, le documentaire de Cash investigation nous dit quelque chose d’essentiel sur l’incompréhension de notre société vis-à-vis des modes de fonctionnement de l’Eglise. Que des prêtres condamnés puissent rester en fonction – fusse comme aumônier d’hôpital – que des évêques convaincus de non-dénonciation conservent leur poste ; que des cardinaux suspects de complaisance continuent de sièger au G9 auprès du pape François… leur est incompréhensible. (3)
Que dans un pays de laïcité le code de droit canonique – sinon la loi de Dieu – puisse prévaloir sur celle des hommes ou lui être contraire interpelle le citoyen. (4) Autorisant Elise Lucet à évoquer, ce soir-là, la possible constitution d’une commission d’enquête parlementaire sur les affaires de pédophilie dans l’Eglise ; avec l’assentiment de François Devaux, président «exaspéré» de la Parole libérée et peut-être celle de nombreux chrétiens sous le choc, devant leur écran de télévision. (5)
Se donner les moyens d’une parole à son tour libérée
Dire que l’institution ecclésiastique se doit aujourd’hui d’ouvrir le dialogue, quel que soit son sentiment d’injustice ou d’incompréhension, tient de l’euphémisme. Cash investigation a frappé fort, non sans arrière-pensées peut-être, là où les médias chrétiens les mieux intentionnés seront toujours tenus par une certaine déférence envers l’institution. C’est pourquoi le choix de la chaise vide lors du débat qui a suivi l’émission apparaît comme une faute. C’est bien connu : les absents ont toujours tort. L’Eglise s’est privée là d’un droit éventuel de rectification, d’explication, de mise en perspective… De même que de la possibilité d’interpeller la société sur ses propres contradictions lorsqu’elle exige la mise à l’écart définitive de tout prêtre ou religieux coupable dans le même temps où elle plaide, ailleurs, pour la réinsertion des condamnés.
On peut entendre Mgr Crépy, lorsqu’il explique avec franchise : « Je suis encore nouveau dans mes fonctions, l’exercice est un peu difficile. Je ne me voyais pas sur le plateau, être mal à l’aise alors que je représente l’Eglise. » (6) L’exigence n’en est que plus grande pour l’Eglise de France de se donner les moyens d’une parole, à son tour libérée, sur ces questions. Le 12 décembre dernier la Cef organisait une réception de fin d’année dans ses locaux de l’avenue de Breteuil, à l’intention des mouvements d’Eglise et des médias. Dans son discours de bienvenue, Mgr Pontier évoquait quelques événements marquants de l’année 2016… sans la moindre allusion aux affaires de pédophilie qui avaient pourtant ébranlé le monde catholique et plus particulièrement le diocèse de Lyon. Qui dira le prix du silence ?
L’accusation se trouve dans le communiqué de la Cef justifiant sa non-participation au débat.
Son témoignage ne figure pas dans le document lui-même mais dans le débat qui a suivi.
On entend parfois, ici ou là, des personnes qui par ailleurs se sont élevées contre le projet de déchoir de la nationalité française des binationaux coupables d’actes terroristes, s’étonner que des prêtres pédophiles fassent toujours partie de l’Eglise…
Le secret qui entoure la procédure des procès canoniques fait également débat, qui semble avoir pour effet essentiel de « protéger » l’accusé et l’institution à laquelle il appartient, au détriment des victimes.
Dans le débat, où cette question est évoquée, le sociologue Olivier Bobineau insiste néanmoins pour qu’une telle commission d’enquête, si elle devait voir le jour, porte sur la pédophilie dans toutes les institutions, donc également dans l’éducation nationale. Olivier Bobineau est par ailleurs l’auteur du livre Le sacré incestueux. Les prêtres pédophiles. Ed. DDB, 2017.
Notons au passager que lorsque Mgr Crépy explique son absence du débat, par le fait – compréhensible – qu’il ne se sentait pas suffisamment en possession de son dossier, il fait un sort à la version officielle de la chaise vide, justifiée par le manque de déontologie des journalistes dans le documentaire.
Sur la question de la pédophilie dans l’Eglise, articles publiés sur ce blogue en 2016
Spotlight, des vérités qui continuent d’effrayer
Sur les questions de la pédophilie et des dérives sectaires en France. Lien
Abus sexuels : le mal à la racine
Sur la timidité de l’épiscopat à s’engager vraiment. Lien
Pédophilie : l’Eglise sous le scalpel
A propos du livre d’Isabelle de Gaulmyn sur l’affaire Prenant.