jeudi, 23 mai 2013
Jean Mercier décrypte le Pape François
Intéressantes et synthétiques les notes du journaliste de la Vie Jean Mercier. Nous comprenons les idées clefs du Pape Bergoglio. A lire
petit apéritif
- le scandale de la pauvreté, .... pour l’importance d’une implication corporelle, tactile, envers les pauvres, (et donc contre une charité se satisfaisant du chèque pour les oeuvres caritatives). Le lavement des pieds en prison du Jeudi saint, les gestes envers les handicapés, le propos sur la tendresse de sa messe inaugurale vont dans ce sens
- la peur des chrétiens ...
- la mentalité “autoréférentielle” .... cette manière autarcique de communiquer en eux en causant “patois de Canaan” comme une sorte de langue interne, de se replier sur leurs “valeurs”, leurs cénacles, leurs penseurs, cette autosuffisance en quelque sorte.
- la mentalité gestionnaire des cadres ecclésiaux : le pape s’en prend à une vision huilée des rouages de l’Eglise, à une Eglise dévitalisée de sa dimension de sainteté et qui se considère comme une simple ONG;
- la conscience endormie du chrétien, et contre l’endormissement des prêtres et évêques;
- le christianisme de salon, c’est-à-dire les chrétiens qui donnent le change en parlant de choses religieuses autour d’une tasse de thé, sans que cela ne change rien à leur vie;
- les chrétiens hypocrites, qui ont une sorte de double vie : une face honorable pour la galerie, et une vie morale aux antipodes de ce qu’ils pratiquent;
- la mondanité, c’est-à-dire contre les chrétiens vivant selon les critères du narcissisme, du consumérisme, de l’hédonisme. Le pape se lamente que cette mentalité dominante ait gagné les catholiques;
- le cléricalisme sous toutes ses formes. Il s’agit là de la critique la plus violente de Bergoglio, qui fustige sans cesse la dérive autocratique des clercs (voire des laïcs qui se sont cléricalisés), ou ces pharisiens qui manquent de miséricorde (refusant de baptiser des enfants nés hors mariage), ou ceux qui s’arrogent le droit de faire pression sur les consciences, qui ne savent pas collaborer avec les laïcs.
Il rappelle aux prêtres qu’ils doivent avoir l’odeur de leurs brebis, image parlante de la proximité charnelle qu’un prêtre doit entretenir avec son peuple. Lors de la messe chrismale, il a expliqué aux prêtres de Rome (et donc du monde) que l’onction qu’ils ont reçue ne doit pas être gardée pour eux mais partagée, à l’image du parfum qui se répand, en toute profusion.
- le capitalisme sauvage ...
Bref, un Pape Pasteur et communicateur, un Evangélisateur qui touche les coeurs et les gens.
19:30 | Lien permanent | Commentaires (6) | | |
Commentaires
Bonjour,
S'il m'est arrivé de trouver fort pertinents certains propos de Jean Mercier, je me permets de dire que, dans ce cas, je trouve ses "notes" fragilisées justement par certains défauts que le pape lui-même déplore en parlant de cléricalisme ou de manque de sens pastoral. Ici, en effet, les positions du pape François me semblent passées à la moulinette d'un cléricalisme à la française, c'est à dire, entre autres excès, un cléricalisme qui a prétendu avec beaucoup de prétention pouvoir fonctionner avec peu de prêtres ou des prêtres effacés derrières des "équipes" puis avec un minimum de lieux, un cléricalisme s'efforçant d'imposer idées et postures parfois fort généreuses mais peu fondées sur la pratique des sacrements, ce qui distingue particulièrement l'Eglise des ONG... le cardinal Lustiger fut contesté pour avoir dit et essayé de faire autrement que ce cléricalisme-là, Jean Mercier semble l'avoir oublié.
Ainsi donc, je pense que certains exemples donnés par Jean Mercier ne sont guère représentatifs de la pensée du pape qui ressemble à celle du cardinal Lustiger, et sur laquelle j'ai essayé de me renseigner en cherchant à savoir quelle pastorale le pape avait recommandée en tant qu'évêque. J'ai lu, par exemple dans plusieurs entretiens et reportages publiés depuis plusieurs années par "30 jours"(et en ligne sur le site de ce journal même si sa publication "papier" est suspendue), que le cardinal Bergoglio recommandait l'ouverture d'un maximum de lieux de culte, ce qui est bien différent de la pastorale dont Jean Mercier pense pouvoir parler à partir des déclarations du pape, pastorale qui était recommandée dans le diocèse de Buenos Aires où le clergé est peu nombreux mais dont l'évêque souhaitait qu'il soit, disons, visible... Je connais des prêtres, en France, qui parviennent à desservir beaucoup de lieux de culte dans plein de villages et qui ne sont pas ou sont moins épuisés que leurs confrères qui, eux, s'épuisent à mettre en place les "renoncements" que semble appeler Jean Mercier. Les prêtres en question, qui ont l'occasion de rencontrer les gens lors de leurs allées et venues entre les différents lieux, font, certes, des préparations au baptême mais n'imposent pas les parcours alambiqués dont leurs confrères "renonciateurs" sont spécialistes, parcours qui ne mettent pas seulement à la porte les gens pas mariés - comme le dit un peu Jean Mercier - mais qui excluent tout le monde, gens mariés ou pas, dans la mesure où, ces gens ayant une vie professionnelle et familiale et sociale, il y a toujours un moment ou ils ratent le parcours et sont mis sur la touche, d'ailleurs souvent dès le début...
Je constate que le pape François a une grande foi dans les sacrements et dans la grâce divine qui fait son chemin dans le cœur des personnes, y compris par les voies de la piété populaire (honnie par les "renonciateurs" que je connais) et qu'il est regrettable que cela ne soit pas mis en valeur dans les notes de Jean Mercier et dans bien d'autres publications, cela permettrait de mieux comprendre ce que dit le pape François à propos de la pauvreté, des injustices et de bien d'autres sujets concernant les postures que prennent les chrétiens dans la société ou les attitudes qui devraient plutôt être les leurs. La pensée du pape s'est nourrie de la théologie dite "du peuple", du jésuite argentin Juan Carlos Scannone, laquelle offre fort peu de points de comparaisons avec ce qui s'est pratiqué en France ces dernières décennies, pas seulement parce que le contexte est différent de celui de l'Argentine mais aussi parce que les clercs et laïcs cléricalisés qui ont donné le ton n'allaient pas dans le sens d'un simple contact avec les gens mais voulaient édifier des choses compliquées à destination de militants friands de réunions.
Ce que l'on dit vite est toujours un peu caricatural de la pensée d'autrui, et cela vaut pour ce que j'écris ici, mais vraiment je pense que ce qu'écrit Jean Mercier est caduc; même s'il évoque des problèmes qui se posent effectivement, comme le cas des laïcs cléricalisés, c'est de manière trop décalée par rapport à ce que l'on peut savoir de ce qui fut pratiqué par le pape lorsqu'il était évêque.
Je pense donc que si le pape François peut avoir le rôle d'un défibrillateur, et je le souhaite, ça ne sera pas dans le sens indiqué par Jean Mercier qui ne met pas assez en relief le cœur de la pensée et de l'action du serviteur des serviteurs du Christ.
Sincères salutations.
C.J.
Écrit par : C.J. | jeudi, 23 mai 2013
Bien vu, CJ!!!
Écrit par : mcm | jeudi, 23 mai 2013
Je comprends et trouve fort pertinente la référence capitale aux sacrements. Oui, comme vous le dites bien, le Pape, comme le Père Michel Marie Zanotti, Sorkine, croient à l'efficacité de la grâce. Encore heureux! Je voulais aussi ajouter une mention toute spéciale pour le sacrement du Pardon, car c'est un Pape qui diffuse la divine Miséricorde. Sans oublier la Vierge Marie, tendre dévotion qui fait partie de sa vie.
Ceci dit, comme vous le dites, on ne peut pas tout dire et exprimer dans un article, et notre compréhension reste partielle. Il me semble toutefois que vous insister plus sur la pastorale propre à la France, différente de l'Argentine. Il me semble que le cléricalisme est tout de même assez semblable. Je n'ai pas senti que Jean Mercier voulait parler de pastorale, sauf à la fin avec la recherche des catéchistes. Je n'ai pas repris ces jugements personnels, car je ne les partage pas totalement, mais chacun peut avoir ses opinions.
Pour avoir parcouru les livres sur le Cardinal Bergoglio ( il a accordé très peu d'interviewes, alors qu'il est un communicateur fantastique ) j'ai trouvé en Jean Mercier un petit apéritif assez synthétique pour mieux comprendre la pensée de notre Pape, afin de mieux connaître sa personne. Il était pour moi un parfait inconnu. Sans doute pas pour vous.
Je pense que notre Pape reste encore, à part quelque exception, un inconnu en Europe. Tout comme Ratzinger a été déformé, récupéré par un certain courant traditionaliste et caricaturé grossièrement par une certaine presse, le Pape François a été accueilli comme un correcteur de Benoît XVI. Ce qui n'est pas le cas, et mes découvertes vont dans le sens d'une profonde continuité spirituelle, avec certes un style différent.
Merci pour votre note.
Écrit par : Don Dom | jeudi, 23 mai 2013
Bonjour,
Je me suis permis d'insister sur la pastorale parce que j'ai remarqué que les commentaires de Jean Mercier portent spécialement sur ce point lorsqu'il ajoute ce qu'il estime être un éclaircissement après avoir résumé tel ou tel propos du pape, je me réfère bien sûr à l'intégralité de ses notes dont vous donnez lien.
Je me permets d'autant plus d'insister que cette publication me semble être la synthèse de presque trente années de participation à des instances paroissiales et diocésaines où l'abandon de lieux de culte et l'éloignement des gens organisé par la complication de toute démarche était justifié par la soi disant volonté de "faire" une Eglise pauvre et à l'écoute des problèmes du monde identifiés à toute une série d'injustices. J'ai vécu cela dans trois diocèses et je me souviens particulièrement de l'intervention d'un vicaire général du diocèse voisin d'un de ceux où j'ai eu des responsabilités qui vint expliquer combien il avait changé d'avis au sujet de cette pastorale-là et de ses justifications quand il avait constaté que la réduction volontaire des lieux de culte avait fait chuter la pratique de moitié dans l'ensemble de son diocèse où les fidèles les plus humbles exprimaient un sentiment d'abandon et dont ce vicaire général disait que le diocèse ne s'était jamais remis, ceci se déroulant entre 1985 et 1995... Ce prêtre est aujourd'hui évêque, il avait été invité au début des années 2000 par l'évêque voisin pour réfléchir sur la nécessaire adaptation de l'organisation de son diocèse à lui mais sans tomber dans des errements justifiés, je le répète, par une soi disant pauvreté de l'Eglise s'opposant à telle et telle injustice.
Ainsi donc les notes de Jean Mercier me semblent aller dans le sens du cléricalisme à la française qui projette aujourd'hui ses rêves sur le pape François sans essayer de voir quelles sont les priorités exprimées par ce pape, priorités qui permettent de saisir dans quelles perspectives il parle de pauvreté et d'injustices, pas l'inverse.
Je me permets encore d'ajouter que pendant toutes ces années et x réunions, j'ai entendu une seule fois expliquer clairement le lien entre les sacrements et l'attitude des chrétiens dans la société, hélas je ne pense pas que c'était parce que les intervenants estimaient que ce lien était évident comme on pourrait le croire mais c'est plutôt parce que ces intervenants estimaient que la mise en place de structures encadrant les bonnes attitudes était prioritaire sur les sacrements, tout cela s'harmonisant avec l'effacement des prêtres derrière des "équipes" chapeautées par des laïcs cléricalisés aimant pérorer sur la pauvreté.
Merci de votre attention à ma première communication et à celle-ci qui la complète.
Sincères salutations.
C.J.
Écrit par : C.J. | vendredi, 24 mai 2013
J'abonde dans le sens de C.J. je trouve par ailleurs de très mauvais goût l'expression "proximité charnelle qu’un prêtre doit entretenir avec son peuple"...
Écrit par : Ph.Martin | vendredi, 24 mai 2013
Je partage votre avis sur la projection qui est opéré sur le Pape François. Elle a joué a plein au début, avec des expressions: bienvenue Frère François....
Je vous remercie pour vos propos car j'apprends aussi bien des choses. Je suis actuellement auxiliaire en paroisse, et je ne baigne pas totalement dans tous les rouages de la pastorale. En fait si, car je suis au contact avec les âmes, sur le terrain, en direct, sans participer trop à des réunions. Aussi vos propos sont fort pertinents.
Pour la proximité charnelle, est-ce parce que le charnel ferait référence à la sexualité ? Une simple question. Ceci dit, le catholicisme français est très intellectuel par un certain côté. On parle beaucoup de la liturgie, mais sans reprendre les signes concrets de la Tradition.
Je comprends cette expression en disant qu'un prêtre donne tout son être pour son troupeau, il est présent physiquement. On le voit dans les images, notre Pape est totalement donné à la foule. La dimension du corps est salvatrice, car nous sommes sauvés par le Corps du Christ.
Il n'y a rien de sexualisé dans cette dimension. Notre culture hyper érotisé et hyper sexualisé, sexe omniprésent dans les médias, nous joue peut-être des tours sur la bonté du corps fait pour le Seigneur, qui n'est pas une partie de nous-même, mais qui est notre personne.
Désolé si je vous ai mal compris.
Écrit par : Don Dom | vendredi, 24 mai 2013
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