dimanche, 16 janvier 2011
Nos pères dans la foi, l'oecuménisme et Assise
Demain 17 janvier sera la journée de dialogue avec nos pères dans la foi, les Juifs, nos frères préférés ( que Benoît XVI n'aime pas trop appeler "aînés" car le frère aîné a trahi); par cette attachement à cette souche, commencera le mardi 18 janvier la semaine de prière pour l'unité des chrétiens qui se terminera le 25 janvier par la fête de la conversion de Saint Paul.
La passion de l'unité, entre catholiques, entre chrétiens, avec ceux qui portent la racine de notre foi, avec tous les croyants et avec tous les hommes de bonne volonté est au coeur du pontificat de Benoît XVI. Comprendre cette ouverture de la vérité demande la conversion du coeur, de l'intelligence et de toute la vie, car, "pour nous les hommes et pour notre salut", le Verbe a pris chair de la Vierge Marie et s'est fait homme.
Pourquoi être avec le pape à Assise (traduction: Benoît et Moi)
Andrea Tornielli
14-01-2011
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Au début de l'année, Benoît XVI au cours de l'Angelus, a annoncé la convocation - avec sa participation - d'une rencontre mondiale des religions à Assise pour invoquer la paix, à l'occasion du vingt-cinquième anniversaire du premier rassemblement voulu par le vénérable (et bientôt bienheureux) Jean-Paul II en Octobre 1986.
Cette première réunion fut précédée et accompagnée de nombreuses polémiques. Certains cardinaux influents ont exprimé des doutes sur l'opportunité de la convoquer. Tandis que Mgr Marcel Lefebvre, à l'époque suspendu a divinis, mais pas encore excommunié, en appela à sept cardinaux, dont l'archevêque de Gênes Giuseppe Siri, en leur demandant d'arrêter le pape, qui selon lui persistait "à ruiner la foi catholique" tournant en dérision le Credo et le Décalogue, et définissant comme "abominable" le meeting inter-religieux (ndt: www.laportelatine.org/ ).
En cette occasion, pas par la faute du Pape, il y eut des bavures et quelques abus (mais tout n'est pas vrai, parmi ce qui circule et s'auto-reproduit sur le Web). Le discours de Jean-Paul II, à l'élaboration et à la révision duquel travailla celui qui était alors le cardinal Joseph Ratzinger, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, était clair. Bien que, comme Ratzinger lui-même l'a souligné plus d'une fois, il convient de prendre au sérieux les inquiètudes de ceux qui craignent que ces rencontres ne véhiculent l'idée que toutes les religions sont égales, qu'elles conduisent toutes de manière égale au salut.
Ces derniers jours, plusieurs historiens catholiques et journalistes proches de la sensibilité traditionnelle (ndt: il n'a pas écrit "traditionaliste") ont signé un appel au pape Benoît XVI publié dans le quotidien Il Foglio (Benoît XVI ira à Assise), reprenant ces préoccupations et ces doutes. Certains d'entre eux sont des collaborateurs appréciés de La Bussola. Ils demandent au pape de considérer les risques d'un tel événement, et se disent sûrs que quoi que Ratzinger dira ou fera à Assise, le message véhiculé par les médias sera celui - erroné - du syncrétisme religieux, d'une étreinte périlleuse entre vérité et erreur qui met tout et tout le monde sur le même plan. Et il est clair que les perplexités exprimées par les signataires sont partagées par plus d'un dans l'Eglise.
Personne ne nie la possibilité de critiquer la décision papale sur la base de motivations de convenance, et on ne peut certainement pas dire que l'appel d'Assise est irrespectueux. Paul VI, Jean-Paul II et aujourd'hui Benoît XVI ont été soumis au sein de l'Eglise à des critique et des dissidences autrement graves, souvent caustique, et féroces. Cela dit, l'auteur de ces lignes a cependant trouvé hors de propos, les raisons invoquées dans la lettre ouverte au pape, et le fait que, malgré la longueur de l'appel lui-même, on y ait omis toute mention de la deuxième réunion des religions du monde à Assise, convoquée, toujours par Jean-Paul II en Janvier 2002 après les attentats contre les Twin Towers.
Venons-en d'abord aux motivations. Les signataires, pour convaincre le pape de repenser à Assise, dans l'espoir qu'il n'ira pas (bien que non explicite, c'est bien là le sens), avancent des raisons théologiques, citant des textes de Léon XIII et de Pie XI. De toute évidence plus que légitime, même si, selon moi, mal venu: l'effet obtenu - au-delà des intentions - est en effet de vouloir expliquer à un pape théologien, qui connaît très bien l'enseignement de les prédécesseurs, les raisons pour lesquelles il devrait revenir sur une annonce déjà faite.
Il est hasardeux d'en appeler au pape pour lui expliquer qu'il ne doit pas prendre une initiative déterminée parce qu'elle n'est pas dans la ligne de son pontificat. Parce qu'au fond, c'est ce qu'on lit dans cet appel. On y dit au Successeur de Pierre que pour être en conformité avec son propre enseignement, il doit changer d'idée. Ce qui prouve l'existence de "ratzingeriens" qui se révèlent être, ou paraître, plus ratzingeriens que Ratzinger. En somme, l'initiative ne se limite pas à être la lettre soucieuse de gens demandant au pape d'éviter les risques d'une mauvaise interprétation, elle est susceptible au contraire d'être lue comme une volonté de dicter au pape sa ligne, pour l'empêcher de sortir du programme de son propre pontificat.
Ce qui signifie, en fin de compte, qu'on s'est fait une certaine idée de Benoît XVI qui ne correspond pas à la réalité, aussi parce que c'est le Pape lui-même - sans aucune pression ou suggestion de quiconque - qui a décidé de convoquer Assise III.
Nous arrivons au second point. C'est Jean-Paul II, peu avant son départ pour Assise en Janvier 2002, qui voulut avoir à côté de lui, le cardinal Ratzinger (ndt: cf La splendeur de la paix de François ). Lequel participa et écrivit à à son retour une profonde méditation sur la signification du geste et de l'expérience vécue (ibid).
"Il ne s'est pas agi - écrit le futur pape sur 30 Giorni - d'une auto-représentation de religions qui seraient interchangeables entre elles. Il ne s'agissait d'affirmer une égalité des religions, qui n'existe pas. Assise a été plutôt l'expression d'un chemin, d'une recherche, du pèlerinage pour la paix qui ne l'est que si elle est unie à la justice".
"Avec leur témoignage en faveur de la paix, avec leur engagemnt pour la paix dans la justice - écrit encore le cardinal Ratzinger" les représentants des religions ont entrepris dans la limite de leurs possibilités, un voyage qui doit être pour tous un chemin de purification".
Les amis et collègues qui ont signé l'appel n'ont présenté que les doutes et les risques, en évitant de mentionner les motivations du futur Pape. Cela vaut pourtant la peine de rappeler que dans le livre "Foi, vérité et tolérance", Joseph Ratzinger affirmait que même s'il y a toujours des "risques indéniables" d'incompréhension, "il serait tout aussi erroné de rejeter entièrement et sans condition, la prière multi-religieuse", laquelle doit être liée à des conditions précises et rester un signe "dans des situations extraordinaires, où, pour ainsi dire, s'élève un cri commun d'angoisse, qui devrait toucher le cœur des hommes et en même temps secouer le cœur de Dieu ".
On peut être en désaccord, on peut exprimer son inquiétude , mais on ne devrait pas ignorer ce que Ratzinger lui-même dit à ce sujet, expliquant la signification de ces gestes. En 2002, les bavures de 1986 ne se répétèrent pas, comme l'a récemment reconnu le supérieur de la Fraternité Saint-Pie X lui-même, Mgr Bernard Fellay. Le vénérable et bientôt le bienheureux Pape Jean Paul II, a voulu rassembler les religions pour ôter toute justification théologique à l'utilisation de la violence, à l'abus de son nom de Dieu pour justifier le terrorisme.
À une époque où le choc des civilisations était présenté comme inévitable, il voulait indiquer le rôle des religions dans la construction de la paix. Depuis dix ans maintenant, il nous semble que sur la scène mondiale l'idée dominante est celle du conflit entre les religions et de l'exaspération de ce dernier, et pas de l'"accolade" syncrétique qui fait apparaître tous égaux et tous bons.
Attribuer aux rencontres d'Assise la responsabilité de la perte de la foi en Jésus Sauveur unique, faire valoir qu'à la suite de ces rencontres interreligieuses les gens en sont venus à considérer l'égalité de toutes les religions, nous semble objectivement injuste. Comment il est injuste d'attribuer au Concile Vatican II, la crise de la foi qui a caractérisé les dernières décennies du siècle écoulé.
Le pape a indiqué cette année la liberté religieuse comme un moyen indispensable pour construire la paix, il y a quelques jours, il a rappelé qu'on ne peut nier "la contribution des grandes religions du monde au développement de la civilisation". Le successeur de Pierre considère que l'humanité vit aujourd'hui un moment suffisamment difficile pour justifier les risques d'Assise III.
On peut ne pas être d'accord avec lui, mais il n'est pas juste de dire que le pape n'est pas d'accord avec lui-même. S'il y en a un dont on peut être sûr qu'il ne donnera pas prise à des malentendus, c'est bien Joseph Ratzinger, aujourd'hui Benoît XVI.
C'est à nous qui sommes en charge de l'information, comme du reste plusieurs des signataires de l'appel, de faire passer le bon message sur cet événement.
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