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dimanche, 28 novembre 2010

Entretien avec Peter Seewald

Source : La Croix, Frédéric Mounier

25/11/2010

Au fil de ses rencontres avec Benoît XVI, l’ancien journaliste du «Spiegel» et du «Bild, qui avait quitté l’Église, y est revenu.

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Le journaliste Peter Seewald, co-auteur du livre de Benoît XVI Lumière du monde, chez lui en Bavière, le 15 novembre 2010 (Photo : Katharina EBEL/KNA-BILD/CIRIC).

L’homme ne décolère pas. Mardi 23 novembre, au soir de son épuisante journée (conférence de presse au Vatican, audience avec le pape, nombreux entretiens avec les médias), Peter Seewald accuse le coup.

Il a du mal à supporter ses confrères journalistes, notamment ceux qui ont réduit son livre d’entretiens avec Benoît XVI (1) à la question du préservatif : « Lorsqu’on étroitise tellement une question, cela montre une crise du journalisme qui n’est plus capable de discerner l’essentiel et de le faire partager à ses lecteurs. » Et l’ancien journaliste du Spiegel, du Bild, du Süddeutschen Zeitung, insiste sur son objectif : «Modifier l’image du Panzerkardinal, faire connaître Benoît XVI en version originale.»

Ces cinq dernières années, il a dû s’y prendre à trois reprises pour arracher l’accord de Joseph Ratzinger. Pourtant, une ancienne complicité unit les deux hommes.
 

Il signe sa « sortie d’Église » en 1973


Géographique d’abord : Seewald est né en 1954 dans une famille catholique de Passau, aux confins de la Bavière et de l’Autriche, région chère au cœur du pape bavarois. Linguistique ensuite : « Entre nous, nous parlions en dialecte », confie Seewald.

Mais, plus profondément, ils partagent une même interrogation : où va notre société ? où prend-elle ses racines ? « Je crois au potentiel révolutionnaire du christianisme dans la société », assure Peter Seewald, dont les questions au pape sont pourtant souvent teintées de noir. « Il est plus optimiste que moi », sourit-il.

Ce questionnement essentiel, les deux hommes l’ont déjà partagé dans deux livres : Le Sel de la terre en 1997 (2) et Voici quel est notre Dieu en 2001 (3). Dans les années 1968, le jeune Seewald est séduit par le gauchisme révolutionnaire. Il signe sa « sortie d’Église » en 1973.

«Le pape ne s’est récusé devant aucune question»

Puis, peu à peu, il s’interroge : « J’entrais parfois dans une église. Bien que doutant et méfiant envers la Révélation, il me paraissait indéniable que le monde n’était pas dû au hasard, comme Marx et d’autres l’affirmaient. J’ai pris conscience que, derrière la liturgie, les prières, les commandements, il devait y avoir un fondement, une vérité. »

Et puis… « un jour, j’ai compris que les idéaux de ma jeunesse, je les retrouvais tous dans le message du Christ. Il suffit de lire l’Évangile. Les réponses y sont beaucoup plus radicales que celles du Manifeste de Marx. » Voyant grandir ses deux garçons, aujourd’hui âgés de 22 et 27 ans, en dehors de l’Église, il s’inquiète : « J’ai trouvé terrible qu’ils n’aient pas eu accès à cette culture séculaire. Paradoxalement, un jour, ils ne pourraient même pas faire le choix que j’avais pu faire : sortir de l’Église. »

C’est donc sur cet humus spirituel et culturel que s’est développée la relation, professionnelle et personnelle, entre le pape et le journaliste. « Pour moi, il est plus qu’un grand penseur intellectuel : un maître spirituel », confie Peter Seewald.

Le tout dans un climat de confiance : « Le pape ne s’est jamais récusé devant aucune de mes questions. Parfois, j’hésitais, je sentais le poids de sa charge. Mais finalement, j’ai posé toutes mes questions, sur toutes les affaires, même scandaleuses. » Pourtant, avoue-t-il, « six heures avec un pape, c’est court ».

Frédéric MOUNIER, à Rome

(1) Bayard, 276 p., 21€.
(2) Flammarion/Cerf
(3) Plon/Mame

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