mardi, 20 octobre 2015
Synode pour la famille 2015: le prisme médiatique déformant
"le synode est, en outre, un espace protégé où l’Église fait l’expérience de l’action de l’Esprit Saint". (Pape François)
L'Esprit Saint au coeur du Synode
Pour avoir obtenu ma licence en communication à Rome en 2011 par un travail de recherche sur le Synode du Moyen-Orient de 2010, je peux constater une certaine analogie avec celui pour la famille de 2015.
Pour 2010, l'Assemblée fut médiatisée selon le célèbre fonctionnement du frame. Mettre en lumière des éléments marginaux et passer sous silence des propos centraux conduit inévitablement à un prisme déformant.
Les discours du Pape Benoît XVI furent massivement ignorés pour laisser la place à une surévaluation des propos d'un seul évêque au cours d'une des dernières conférence de presse. L'évêque en question s'était fendu d'une déclaration personnelle et polémique contre Israël.
Cela ne reflétait en rien la teneur des échanges dans l'aula synodale. Des thèmes comme la paix, la liberté religieuse, la prière, la diplomatie furent totalement relégués dans l'ombre pour laisser la place à un certain "antisémitisme". La presse main stream conclut: Synode anti-israëlien et fut qualifié de politique, alors que le Pape lui avait donné une toute autre direction. L'an passé, le rapport intermédiaire ne correspondait pas aux réalités débattues dans la salle.
Il y a un certain parallèle avec le Synode pour la famille. Certaines déclarations de Sandro Magister, d'un évêque, d'un expert, d'un porte-parole anglophone sont surévaluées.
Pour ce Synode pour la famille, le discours du Pape sur la synodalité, remarquablement situé dans l'héritage du Concile Vatican II, du bienheureux Paul VI, de saint Jean-Paul II et des Pères de l'Eglise, est passablement déformé.
L'idéologie de la rupture occupe largement l'arrière fond de la scène. Les propos théologiques du Pape sont tordus pour se concentrer sur la décentralisation et le pouvoir confié aux conférences épiscopales.
Le Pape parle d'une "salutaire décentralisation". Le contexte qui permet de situer les conférences épiscopales est d'abord le Concile Vatican II, puis le droit canonique (cela ne veut pas dire que les Allemands feront sécession - lire Mgr Chaput)
Pierre crucifié la tête en bas
Mais c'est surtout la pyramide inversée qui est centrale dans l'intervention du Pape François. Le Pape est le serviteur des serviteurs de Dieu. Raison pour laquelle Saint-Pierre fut crucifié la tête en bas. Le Pape est un fidèle, évêque parmi les évêques, qui préside à la Charité et à l'Unité de toute les Eglises.
Il est intéressant de voir que ces organismes décentralisés (Eglise particulière: conseil presbytéral, conseil pastoral - Conférence épiscopale) jouent leur rôles lorsqu'ils sont en communion avec le bas, soit avec le Pape, suivant le Christ qui lave les pieds de ses disciples:
"Une Eglise synodale peut commencer à prendre forme seulement dans la mesure où ces organismes demeurent connectés avec le bas et partent du peuple, des problèmes de tous les jours" (discours du Pape François)
François est un Pape radical, dans le sens qu'il fait toujours retourner l'Eglise à sa source, à ses racines.
Le sensu fidei ou le flair de la foi
C'est le flair des fidèles, le sensus fidei, le sens de la foi présent chez tous les baptisés qui assure la solidité, l'unité et la profonde communion de l'Eglise (et non pas le sensus fidelium, comme en démocratie, selon le sens des fidèles, du peuple). En ce sens, c'est l'Eglise qui est infaillible, lorsqu'elle professe la foi, depuis le Pape, en passant par les évêques jusqu'au dernier des fidèles (Concile Vatican II).
Toute une frange ou une nébuleuse disons "conspirationiste" ou "complotiste" s'attaque au Pape (ex. Thompson). Mais sur quel critère ? Pour suivre des idées ? un système de pensée, certes peut-être bien construit mais pas sur la réalité ?
Le christianisme n'est pas une idéologie, ni un simple code de doctrines, ni une belle idée, mais un chemin qui conduit vers une Personne, le Christ. On trouve Jésus dans l'Eglise, soit dans cette communion qui a pour Bergers et Pasteurs le Pape et les évêques en communion avec lui. Là où est le Pape, là est l'Eglise dit l'adage des Pères de l'Eglise.
Le Pape, citant Saint Jean Chrysostome l'affirme: "Eglise et Synode sont synonymes". Jésus est le Chemin, puis la Vérité et la Vie. J'ai totale confiance en ce chemin, fort scabreux et sans doute chaotique en l'état, que le Pape conduira jusqu'à la vérité tout entière, car il l'a toujours laissé entendre: l'enseignement de l'Eglise ne sera pas changé.
Ce travail de l'Esprit Saint au coeur du Synode viendra à la lumière et se fera surtout encore plus proche des personnes aux coeurs blessés. L'Evangile de la famille et l'enseignement de la vérité qui sauve sont une seule et même Miséricorde.
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Commentaires
Cet article de JM Guenois dans le Figaro d'aujourd'hui ,vaticaniste honnête et pondéré, en dit plus que de longs discours et exprime bien ce que pense une majorité de catholiques depuis deux ans, malgré tous les efforts des pompiers de service:
Le Pape se démarque encore plus de ses prédécesseurs
VOX Vox Societe
Par Jean-Marie Guénois
Publié le 19/10/2015 à 20h59
ANALYSE - Depuis le début du pontificat de François, il y a deux ans et demi, l'influence des Jésuites sur la gouvernance de l'Église est de plus en plus apparente.
Il y avait à Rome une foule de bons mots sur la présence dans cette ville éternelle de deux… papes. Le pape blanc et le pape noir! Le pape blanc, connu de tous, devait toujours «faire avec» un pape noir moins connu mais très puissant puisqu'on lui attribuait un pouvoir presque aussi vaste. Mais qui était ce pape noir? Non pas un cardinal d'origine africaine ou américaine devenu pape mais le supérieur général des… Jésuites. Le «préposé général de la Compagnie de Jésus», appelé «général» et dont la terrasse surplombe, comme les appartements du Pape, la place Saint-Pierre.
La dette de l'Église catholique à l'égard de cet ordre religieux d'élite est immense bien qu'il fût sans doute l'un des plus combattus à l'intérieur comme à l'extérieur de l'Église, tant son potentiel d'influence sur les esprits était et demeure redouté. Rien d'étonnant du reste pour un ordre religieux qui a placé, comme chez les Dominicains, l'intelligence au premier plan.
Combattus donc, souvent critiqués mais de façon injuste car on leur doit, par exemple, le fait que l'Amérique latine soit un continent catholique. Tout comme une bonne partie de l'Asie. Lors des deux derniers voyages du Pape en Amérique latine, Équateur, Bolivie, Paraguay puis Cuba, pas une église visitée qui n'ait été matériellement construite, il y a plusieurs siècles, par des jésuites!
Sans compter leur capacité à mener partout et depuis toujours un apostolat de l'intelligence, c'est-à-dire des élites des pays, par le biais des écoles et des universités. Certes, beaucoup de jésuites se sont laissé séduire, pendant les années 1970, par la dynamique de la lutte des classes. Ils ont volontairement abandonné le champ - trop bourgeois - de l'enseignement pour se consacrer à la défense des plus pauvres dans le cadre de la théologie de la libération, d'inspiration marxiste, qu'ils ont contribué à diffuser en Amérique latine.
Le grand intellectuel jésuite salué par François était l'opposant ecclésial numéro 1 des papes Jean-Paul II et Benoît XVI
Jamais, sans doute en raison de ces craintes et de ce poids historique, un jésuite n'avait été élu pape. Force est de constater, deux ans et demi après l'élection de François, que jamais les Jésuites et leurs méthodes n'ont bénéficié d'une telle influence sur la gouvernance de l'Église.
La publication, lundi matin, dans le plus grand quotidien italien, Corriere della Sera, d'une longue préface, signée par François, des œuvres complètes du défunt cardinal Carlo Maria Martini, jésuite, archevêque de Milan, papabile, révèle au grand jour l'étendue de ce réseau et confirme l'influence directe de la culture jésuite sur la nouvelle direction prise par l'Église catholique et, au passage, sur l'actuel synode de la famille. Comme si les «deux papes» romains, le blanc et le noir, ne faisaient désormais plus qu'un, puisque cette spiritualité et famille d'esprit joue à présent un rôle décisif pour l'avenir de l'Église catholique!
On ne croit d'ailleurs pas si bien dire, car François a demandé à l'actuel général des Jésuites, l'Espagnol Adolfo Nicolás, d'être l'un des membres de la commission de rédaction du document final du synode - commission controversée parce que non élue par le synode. Dans les arcanes du synode, on assure que le rôle de cet éminent et très intelligent religieux ne se limite pas à cela. C'est en tout cas la première fois qu'un pape ose, de facto, demander à un supérieur général d'un ordre religieux si important de jouer un tel rôle au sein d'un synode.
Évidemment, les Jésuites ne sont pas toute l'Église catholique, et l'Église catholique ne se résume pas aux Jésuites, mais l'hommage public de ce jour du pape François au cardinal Martini - «son héritage est un don précieux pour l'Église», écrit-il - éclaire d'une lumière crue ce pontificat et ses orientations actuelles et à venir: le cardinal Martini, homme d'une grande finesse et hauteur de vue, a toujours été l'opposant ecclésial numéro un des papes Jean-Paul II et Benoît XVI. Ce grand intellectuel jésuite était en effet le promoteur d'un «concile Vatican III» en faveur de la communion pour les divorcés remariés, du mariage des prêtres, du diaconat féminin, de la décentralisation romaine et du renforcement des conférences épiscopales, d'une «Église synodale» enfin où le pouvoir du Pape serait redimensionné. Si le concile Vatican III n'est pas ouvert, les temps y ressemblent fort.
Écrit par : MarieMCM | mardi, 20 octobre 2015
Vrai que les Jésuites ont une grande influence. Mais savez-vous que le Pape, en tant que Bergoglio, était en froid avec l'ordre ? Qu'avant son élection, il ne se rendait jamais à la rue d'à côté de la place, à la Maison générale ?
Enfin, dire que Martini était un homme d'Eglise, ce n'est pas forcément reprendre toutes ses idées. Saint Thomas avait manqué l'Immaculée Conception, et pensait, en se basant sur Aristote, que l'âme d'un ovule fécondé, était crée par Dieu après les quelques jours suivant la fécondation, avec une différence entre l'âme d'une fille et d'un garçon... Or, il s'est trompé, et puis c'est devenu Saint Thomas d'Aquin. Il a donné toute son oeuvre au discernement de l'Eglise.
Aussi, une préface est une marque d'amitié et on va pas faire la guerre à quelques jésuites et pas non plus au Cardinal Martini qui a fait tout de même un bon et excellent travail pour ceux qui était éloigné de l'Eglise.
Ses idées sur Vatican III, les divorcées remariées, le diaconat féminin, la mariage des prêtres, la décentralisation ... etc. ou encore l'Eglise qui a 200 ans de retard, doivent être considérablement relativisées... C'est pas dans une préface que l'on va les accréditer....
Jean-Marie Guénois, homme très cultivé et fort intelligent, n'arrive guère à suivre ce pontificat, comme il l'avait fait pour Saint Jean-Paul II ou Benoît XVI. Il se perd quelque peu ...
Écrit par : Don Dom | mardi, 20 octobre 2015
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