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mercredi, 26 novembre 2014

Les deux images de l'Europe du Pape François: l'arbre et le polyèdre

Autre discours résumé: devant le Parlement européen

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N.B. ( Le Conseil de l'Europe - la Suisse y participe - est distinct du Parlement européen - la Suisse n'est pas membre )

 

Devant le Conseil de l'Europe: extraits: 

 

Dans un long discours, Le Pape François a utilisé deux images, symboles ou paraboles pour décrire l'Europe:

 

- la première provient d'un poète italien Clemente Rebora, qui a écrit un poème sur un peuplier. 

 

- le seconde provient de la géométrie: le polyèdre. 

 

L'Europe vu comme un arbre avec ses branches, son tronc et ses racines

 

poplars-473295_150.jpg... C’est pourquoi, en cette enceinte, je ressens le devoir de rappeler l’importance de l’apport et de la responsabilité de l’Europe dans le développement culturel de l’humanité.

 

Je voudrais le faire en partant d’une image que j’emprunte à un poète italien du XXème siècle, Clemente Rebora, qui, dans l’une de ses poésies, décrit un peuplier, avec ses branches élevées vers le ciel et agitées par le vent, son tronc solide et ferme, ainsi que ses racines profondes qui s’enfoncent dans la terre[7]. En un certain sens, nous pouvons penser à l’Europe à la lumière de cette image.

 

Rebora: « le tronc s’enfonce là où il y a davantage de vrai »[8]. Les racines s’aliment de la vérité, qui constitue la nourriture, la sève vitale de n’importe quelle société qui désire être vraiment libre, humaine et solidaire.  ….

 

Il faut en suite garder bien présent à l’esprit que sans cette recherche de la vérité, chacun devient la mesure de soi-même et de son propre agir, ouvrant la voie à l’affirmation subjective des droits, de sorte qu’à la conception de droit humain, qui a en soi une portée universelle, se substitue l’idée de droit individualiste. …..

 

Un tel individualisme rend humainement pauvre et culturellement stérile, parce qu’il rompt de fait les racines fécondes sur lesquelles se greffe l’arbre. De l’individualisme indifférent naît le culte de l’opulence, auquel correspond la culture de déchet dans laquelle nous sommes immergés. Nous avons, de fait, trop de choses, qui souvent ne servent pas, mais nous ne sommes plus en mesure de construire d’authentiques relations humaines, empreintes de vérité et de respect mutuel.

 

Ainsi, aujourd’hui nous avons devant les yeux l’image d’une Europe blessée, à cause des nombreuses épreuves du passé, mais aussi à cause des crises actuelles, qu’elle ne semble plus capable d’affronter avec la vitalité et l’énergie d’autrefois. Une Europe un peu fatiguée, pessimiste, qui se sent assiégée par les nouveautés provenant d’autres continents.

 

À l’Europe, nous pouvons demander : où est ta vigueur ? Où est cette tension vers un idéal qui a animé ton histoire  et l’a rendue grande? Où est ton esprit d’entreprise et de curiosité ? Où est ta soif de vérité, que jusqu’à présent tu as communiquée au monde avec passion ?

 

De la réponse à ces questions, dépendra l’avenir du continent. D’autre part – pour revenir à l’image de Rebora – un tronc sans racines peut continuer d’avoir une apparence de vie, mais à l’intérieur il se vide et meurt. L’Europe doit réfléchir pour savoir si son immense patrimoine humain, artistique, technique, social, politique, économique et religieux est un simple héritage de musée du passé, ou bien si elle est encore capable d’inspirer la culture et d’ouvrir ses trésors à l’humanité entière. Dans la réponse à cette interrogation, le Conseil de l’Europe avec ses institutions a un rôle de première importance.

 

Je pense particulièrement au rôle de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, qui constitue en quelque sorte la ‘‘conscience’’ de l’Europe pour le respect des droits humains. Je souhaite que cette conscience murisse toujours plus, non par  un simple consensus entre les parties, mais comme fruit de la tension vers ces racines profondes, qui constituent les fondements sur lesquels les Pères fondateurs de l’Europe contemporaine ont choisi de construire.

 

L'Europe: des racines à la multipolarité

 

Avec les racines – qu’il faut chercher, trouver et maintenir vivantes par l’exercice quotidien de la mémoire, puisqu’elles constituent le patrimoine génétique de l’Europe – il y a les défis actuels du continent qui nous obligent à une créativité continue, pour que ces racines soient fécondes aujourd’hui et se projettent vers des utopies de l’avenir. Je me permets d’en mentionner seulement deux : le défi de la multipolarité .....

 

L’histoire de l’Europe peut nous amener à concevoir celle-ci naïvement comme une bipolarité, ou tout au plus comme une tripolarité (pensons à l’antique conception : Rome – Byzance – Moscou), et à nous mouvoir à l’intérieur de ce schéma, fruit de réductionnismes géopolitiques hégémoniques, dans l’interprétation du présent et dans la projection vers l’utopie de l’avenir.

 

Aujourd’hui, les choses ne se présentent pas ainsi et nous pouvons légitimement parler d’une Europe multipolaire. Les tensions – aussi bien celles qui construisent que celles qui détruisent – se produisent entre de multiples pôles culturels, religieux et politiques. L’Europe aujourd’hui affronte le défi de «globaliser» mais de manière originale cette multipolarité.

 

Les cultures ne s’identifient pas nécessairement avec les pays : certains d’entre eux ont diverses cultures et certaines cultures s’expriment dans divers pays. Il en est de même des expressions politiques, religieuses et associatives.

 

Globaliser de manière originale – je souligne cela : de manière originale – la multipolarité comporte le défi d’une harmonie constructive, libérée d’hégémonies qui, bien qu’elles semblent pragmatiquement faciliter le chemin, finissent par détruire l’originalité culturelle et religieuse des peuples.

 

Aujourd’hui, les choses ne se présentent pas ainsi et nous pouvons légitimement parler d’une Europe multipolaire. 

 

Une Europe multipolaire, non comme une sphère, mais un polyèdre

 

polyhedra-299879_150.jpgParler de la multipolarité européenne signifie parler de peuples qui naissent, croissent et se projettent vers l’avenir. La tâche de globaliser la multipolarité de l’Europe, nous ne pouvons pas l’imaginer avec l’image de la sphère – dans laquelle tout est égal et ordonné, mais qui en définitive est réductrice puisque chaque point est équidistant du centre – mais plutôt avec celle du polyèdre, où l’unité harmonique du tout conserve la particularité de chacune des parties. Aujourd’hui, l’Europe est multipolaire dans ses relations et ses tensions ; on ne peut ni penser ni construire l’Europe sans assumer à fond cette réalité multipolaire.

 

Le christianisme ne réduit pas la raison et la raison fait face au fondamentalisme religieux, ennemi de Dieu

 

C’est dans cette logique qu’il faut comprendre l’apport que le christianisme peut fournir aujourd’hui au développement culturel et social européen dans le cadre d’une relation correcte entre religion et société. Dans la vision chrétienne, raison et foi, religion et société sont appelées à s’éclairer réciproquement, en se soutenant mutuellement et, si nécessaire, en se purifiant les unes les autres des extrémismes idéologiques dans lesquelles elles peuvent tomber.

 

La société européenne tout entière ne peut que tirer profit d’un lien renouvelé entre les deux domaines, soit pour faire face à un fondamentalisme religieux qui est surtout ennemi de Dieu, soit pour remédier à une raison « réduite », qui ne fait pas honneur à l’homme.

 

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Autre lien: Famille Chrétienne / I.Media: le Pape a écrit une page de l'histoire

 

 

 

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