jeudi, 27 février 2014
Benoît XVI, pape émérite: entretien de Mgr Georg Gänswein avec le Washington Post
Le Pape émérite Benoît XVI regarde son successeur s'envoler
Par Anthony Faiola
25 Février 2014
Extraits:
Entretien exclusif
Dans un rare entretien dans un média américain, le confident et intime de Benoît XVI, Mgr Georg Gänswein, qui habite avec le pape émérite dans un couvent récemment rénové au Vatican, affirme que malgré leurs différences évidentes de caractère et de personnalité avec le Pape Framçois, le pape émérite Benoît XVI ne cherche pas à influencer le nouveau souverain pontife François, par exemple sur les décisions majeures de l'Église.
Archevêque à 57 ans
Mgr Georg Gänswein - archevêque allemand de 57 ans, connu dans toute l'Italie comme «Giorgio il bello» pour son look de star de film, ce qui lui a valu la couverture de l'édition italienne de Vanity Fair - est dans une situation absolument unique dans le monde du Vatican. Non seulement il reste secrétaire particulier de Benoît XVI, mais il est également le Préfet de la Maison pontificale de François. Il bénéficie ainsi d'un accès extraordinaire aux deux pontifes, l'émérite et l'actuel. Ancien secrétaire et préfet de la Maison pontificale Selon le secrétaire privé du Pape Benoît XVI, également préfet de la Maison pontificale, le Pape émérite développe une relation toujours plus étroite et intime avec le Pape François, surtout par des communications régulières ( ndlr: il semble même qu’il se rend en visite chez Benoît XVI, parfois sans prévenir) Le pape émérite Benoît XVI n'est d'ailleurs pas du tout «jaloux» de la célébrité de son successeur. Il le tient en «très haute estime».
La surprise du Consistoire: deux Papes
En outre, selon Georg änswein, l'apparition surprise de Benoît à une cérémonie de prestation de serment de 19 nouveaux cardinaux le week-end dernier ne doit pas être prise comme un signe de sa réapparition dans la vie publique.
« En fait Benoît XVI était là à l'invitation du Pape François. On ne doit pas s'attendre à ce qu'il prenne l'habitude d'assister à des événements majeurs du Vatican. Le pape émérite a beaucoup réfléchi, puis a fini par accepter. Cela ne signifie en aucun cas qu'il soit prêt pour ainsi dire, à revenir».Gänswein décrit les deux papes comme des personnalités aux caractères fort différents. Avant de devenir le premier pontife à se retirer depuis Grégoire XII en 1415, Benoît XVI, 86 ans, était considéré par de nombreux observateurs du Vatican comme un théologien de poids et conservateur.
Succès médiatique
François, quant à lui, a été adopté par les progressistes comme le pontife de monsieur et madame tout le monde, faisant les manchettes de journaux depuis son commentaire sur le fait de «ne pas juger» les homosexuels jusqu'à à sa récente décision de baptiser personnellement l'enfant d'un couple marié civilement mais pas à’ léglise. Dans le même temps, il a commencé à adopter de vastes réformes, surtout après les scandales de la Banque du Vatican .
«Le style du pape François est très différent, mais cela ne signifie pas que le contenu soit meilleur» dit Gänswein. «Mais son style créé beaucoup d'intérêt parmi les fidèles et surtout à l'extérieur de l'église».
Un Pape émérite qui prie
Gänswein n'a pas parlé directement avec Benoît XVI de la nature de ses communications privées avec son successeur. Selon l'archevêque elles ont lieu régulièrement au travers de lettres, d' appels téléphoniques et de réunions en tête-à-tête. Mais selon lui, le pontife émérite n'a pas essayé d'intervenir sur les questions de gouvernement, par exemple l'élévation récente des nouveaux cardinaux, dont plusieurs sont considérés comme des réformateurs progressistes.
«Si le pape François lui a demandé son avis sur les nouveaux cardinaux, je ne sais pas, mais je ne le crois pas. Le gouvernement est une chose, la communication en est une autre».
Bien que Benoît ait souvent été cloué au pilori par les mass media, Gänswein explique que le pape émérite n'a aucune amertume envers ce cardinal argentin, peu connu, puis devenu le chouchou des médias du monde entier: «Le pape Benoît émérite est bien conscient de la très bonne réputation de son successeur, mais il n'en est aucunement jaloux, parce qu'il voit cette célébrité comme une aide pour tous les fidèles».
Une estime grandissante
Pourtant, les deux hommes sont désormais amis: «L'estime de Benoît XVI pour le pape François est très grande. Et elle a grandi progressivement grâce surtout au courage du nouveau pape, semaine après semaine. Au début, certes, ils ne se connaissaient pas très bien. Mais ensuite, le pape François lui a téléphoné, lui a écrit, lui a rendu visite, lui a téléphoné à nouveau et l'a invité à des rencontres privées, de sorte que leur relation est devenu très personnel et confidentiel".
Une renonciation historique gardée secrète
Benoît XVI avait parlé à son secrétaire de son intention de se retirer bien avant l'annonce officielle du 11 février dernier - un acte auquel il a essayé en vain de de s'opposer: En fait, ma première réaction, instinctive, a été de lui dire: "Non, Saint-Père, ce n'est pas possible que vous renonciez"... Et puis j'ai compris que cette décision avait déjà été prise par le pape Benoît XVI lui-même». Il insiste que la décision de Benoît était liée uniquement à la fragilité et à l'âge, et pas du tout face au scandale "Vatileaks".
La fatigue de Benoît XVI: empêchement pour l'écriture
«Le pape émérite n'écrit plus de livres. Il n’en a plus la force, autrement il n'aurait pas quitté le pontificat. Il faut de la force pour écrire» (ndlr: il dicte encore ses idées)
Les grains de blés ont été plantés
Interrogé pour savoir si Benoît réfléchissait sur son pontificat tumultueux - et s'il a considéré son pontificat comme un succès - son secrétaire avance simplement que les huit ans de Benoît XVI «n'ont pas été des années faciles, pour de nombreuses raisons. Le pape émérite a beaucoup réfléchi à ce propos. Son succès ne se mesure pas à la façon dont les médias l’ont décrit, s'ils l'appréciaient ou non.... Le succès n'est pas le bon angle à partir duquel on peut juger son pontificat. Il a beaucoup planté de grains, et on ne peut pas voir tout de suite la graine. Lorsque la nature aura fait son travail, on pourra voir celles qui poussent».
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