vendredi, 17 janvier 2014
Patrice Favre, Echo Magazine: dire oui à l'enfant
Edito: Dire oui à l'enfant
Les troupes sont squelettiques: les militants anti-avortement, une poignée de politiciens évangéliques et quelques ténors de l’UDC comme Oskar Freysinger ou Fabienne Despot. En face, toute la Suisse officielle ou presque.
Déjà rejetée par les Eglises protestantes, l’initiative qui veut interdire le remboursement de l’avortement par les caisses-maladie n’a pas reçu le soutien des évêques. Sur le site cath.ch, le philosophe François-Xavier Putallaz parle d’une démarche «irréfléchie et déloyale» et les chroniqueurs et lecteurs de l’Echo sont du même avis (voir en pages 9 et 46 - Echo Magazine).
Les faiblesses de ce texte sont connues et je ne vais pas les rappeler ici. Mais je ne me joindrai pas à la curée. Parce que les opposants à l’initiative n’ont pas besoin de ma voix. Et parce qu’un «non» le 9 février ne règlera rien. Dix mille embryons sont éliminés chaque année en Suisse. La mort de ces petits êtres ne peut pas nous laisser tranquilles comme s’ils étaient un déchet inévitable de la sexualité humaine. L’avortement n’est pas un droit, comme le disent les tracts féministes distribués ces jours-ci dans les rues: c’est l’abandon du plus petit d’entre nous, de celui qui a le plus besoin de notre aide..
"On n'avorte pas seulement par manque d'argent."
Disant cela, je ne montre pas du doigt celles qui renoncent à poursuivre leur grossesse, parfois bien malgré elles. Je ne crois pas non plus – à la différence de mes jeunes années – qu’une politique plus sociale suffirait à réduire leur nombre. La France est généreuse avec les familles, mais les interruptions de grossesse y sont proportionnellement plus nombreuses qu’en Suisse. On n’avorte pas seulement par manque d’argent.
Le refus de la vie est complexe et mystérieux. Dans la longue histoire des hommes, aucune société n’a été aussi riche – globalement parlant – que la nôtre. Aucune n’a disposé d’un tel pouvoir sur la nature, aucune n’a été aussi désireuse d’épanouissement personnel. Mais les familles n’ont plus d’enfants. Comme si la femme et le couple ne pouvaient plus accepter des bébés qui sont toujours un souci avant d’être un cadeau. Par manque de confiance en l’avenir? Par volonté de tout maîtriser, en particulier la contraception? Par solitude? Il y a un peu de tout cela, sans doute, et aussi l’incertitude sur ce qui fait que toute vie vaut la peine d’être vécue.
L’initiative sera balayée le 9 février prochain, c’est probable. Mais je rêve que chacun, quelle que soit son opinion, profite de ce débat pour dire l’immense bonheur que donne un enfant. Même quand il arrive au mauvais moment. Et qu’on retrousse ses manches pour redonner à ce pays la joie de vivre qu’il a perdue.
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