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jeudi, 09 janvier 2014

24 Heures: Mgr Alain de Raemy

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ALAIN DE RAEMY, ÉVÊQUE AUXILIAIRE

L’enfant sage est devenu monseigneur

«Barcelone est une ville très laïque.» Alain de Raemy y est né à la Clinique des Etrangers, en Suisse déraciné. Son père fribourgeois et sa mère valaisanne y vivaient, car le métier d’ingénieur du premier les y avait conduits. Le nouvel évêque auxiliaire de Lausanne, Genève et Fribourg dit avoir été un enfant sage. Pas comme sa petite sœur, qui avait affiché sur la porte de sa chambre le slogan «Il est interdit d’interdire». Ce qui avait le don d’énerver le père. La mère, elle, avait le souci de sa progéniture. Et lorsque la turbulente des quatre enfants s’en revenait à point d’heure, elle constatait que la lumière s’éteignait alors dans la chambre des parents. Jamais une remarque de la maman. Papa, heureusement, n’était pas dérangé dans ses ronflements.

Cet homme droit a transmis l’honnêteté et le sens de la précision à son fils. Ado, si sa sœur se passionnait pour la réincarnation à travers les écrits de Lobsang Rampa, lui cultivait la «ligne classique chrétienne». Sans avoir été ni scout ni servant de messe. Il s’y rendait, en famille, le dimanche, et s’y sentait bien pour autant qu’on ne lui demande rien. Trop timide, il refusait de lire un texte aux catholiques francophones rassemblés. «Lorsqu’une mouche mourait dans ma chambre, je l’enterrais. Je couvrais le crucifix en période de carême. Je pratiquais les rituels de la foi sans en être conscient. Je la vivais.»

Alain de Raemy se prête au jeu des questions de bonne grâce du haut de ses 189centimètres, tout en finesse. Il avoue être content de ne pas avoir grandi davantage. Il écoute, concentré, les mains croisées et porte le col romain avec désinvolture. Courtois, il pratique l’humour et manifeste de l’intérêt pour son interlocuteur. «J’aime les gens. La prêtrise m’a donné accès à des milieux très différents. Découvrir de nouvelles personnes me passionne.» Il se trouve assez patient. «Sauf au volant! Là, je ne supporte plus mon prochain. J’ai même honte de mes réactions verbales.» Côté défaut, il confesse un mauvais sens de l’organisation et pas mal de distraction. Pour se souvenir de quelque chose, il doit commander sa mémoire.

L’ancien curé de la paroisse de Boisy- Pierrefleur à Lausanne – il y a été actif cinq ans –, se détend en voyageant. Mais point besoin des Caraïbes pour le mettre en joie. Il lui arrive aussi d’éprouver le besoin d’écouter de la musique «à tue-tête». Quel genre? Du classique au hit-parade. Sa mère l’a initié au cinéma, comme à l’histoire et à la littérature. Il se souvient avec émotion de la projection de Ludwig ou le crépuscule des dieux de Visconti, à sa sortie en 1972. Le curé Paul Frochaux, qu’il connaît du séminaire et peintre lui-même, l’a initié à l’art.

En hiver, Alain de Raemy skie. Mais ce qu’il préfère c’est nager l’été dans les piscines, les lacs. Ou encore mieux dans les vagues d’une mer. La brasse et le crawl ont ses faveurs. Le bon nageur a pourtant éprouvé des difficultés à apprendre à flotter. «A Barcelone, nous étions 30 à 40 pour un seul professeur. J’étais trop philosophe. Je me disais si je coulais personne ne le remarquerait. Au début du cours, je demandais pour aller aux toilettes et je ne revenais pas.» Jusqu’au jour où le prof s’en aperçoit… et lui donne des leçons particulières. D’où la passion pour ce sport.

Ah, Rome et ses très longs étés! Alain de Raemy a été sept ans aumônier de la Garde suisse du pape. C’est là, plus que partout ailleurs dans le pays qu’il a rencontré la Suisse dans sa grande diversité. Il a étudié à Engelberg (OW), fréquenté l’Uni, le séminaire, et tenu une paroisse à Fribourg, exercé à Yverdon, mais c’est au Vatican qu’il entendait tous les jours parler rom anche.

Comment renonce-t-on à la sexualité? «On renonce si on s’investit, si l’affectivité et les sentiments sont parties prenantes du ministère.» Alain de Raemy ne se voyait pas vivre le mariage et la famille. Devenir prêtre impliquait de ne pas avoir d’engagements privés. Il évoque des difficultés, parfois, mais affirme que le principe était clair.

Dans sa thèse de doctorat non terminée – «quelle horreur!» –, il confronte deux interprétations de la phrase «Hors de l’Eglise, pas de salut». Celle du théologien français actuel Bernard Sesboüé qui propose de l’oublier. Et celle du cardinal Charles Journet (1891-1975), ami du philosophe Jacques Maritain, pour qui elle nous oblige à aller davantage en profondeur. «L’Eglise commence là où l’homme s’ouvre à Dieu», souffle le nouvel évêque auxiliaire, qui soutient la seconde.

L’ordination d’Alain de Raemy a lieu samedi matin 11 janvier en la cathédrale Saint-Nicolas à Fribourg.

Michel Rime Texte
Florian Cella Photo

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