vendredi, 03 mai 2013
Votation du 9 juin sur l'asile: Mgr Morerod et les évêques suisses
l’Evangile n’est pas un livre de recettes détaillées
source: 24Heures
ASILE
Mgr Morerod:
«Nous en appelons à la conscience des croyants»
Les Eglises de Suisse sont contre la révision de la loi soumise au peuple le 9 juin. Mgr Charles Morerod s’explique
La protection des personnes persécutées. Tel doit être le noyau central du droit d’asile en Suisse selon les Eglises du pays. Elles l’ont affirmé, hier à Berne, lors d’une prise de position commune. Ainsi, selon elles, les mesures urgentes de la loi sur l’asile qui seront soumises en votation populaire le 9 juin représentent des durcissements contraires à leurs valeurs et contre-productives.
Interview de Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg.
Peut-on fonder sur l’Evangile une position sur un thème aussi sensible que l’asile?
Pas totalement, parce que l’Evangile n’est pas un livre de recettes détaillées. Mais on y trouve des principes qui sont au fondement de notre société, comme: «Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux.» Cela implique de se mettre à la place de l’autre.
Craignez-vous que des fidèles soient contrariés?
Il n’existe jamais de prise de position qui fasse plaisir à tous.
Quel message voulez-vous leur faire passer?
Il est capital pour les chrétiens de songer à la situation des personnes: qu’on ne les oblige pas à se cacher ou à user du service de passeurs (par exemple parce qu’ils ne peuvent plus utiliser le canal des ambassades), car on favorise alors la criminalité.
En quoi l’asile est une thématique qui mérite, plus que d’autres, que l’Eglise sorte de son habituelle réserve?
Nous nous souvenons de certaines phrases de Jésus, comme: «J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire, j’étais un étranger et vous m’avez accueilli.»
Comment l’Eglise fera-t-elle campagne?
Nous attirons l’attention sur des questions peu mentionnées, mais que l’Eglise connaît de par son activité auprès des réfugiés, comme la souffrance des familles divisées. Je rappelle en outre que nous sommes présents en Suisse et dans le reste du monde: la très grande majorité des réfugiés vivent dans les pays voisins de celui qu’ils fuient, et l’Eglise y est aussi présente pour les aider.
Y aura-t-il des actions concrètes qui vont au-delà de cette prise de position face à la presse?
Nous en appelons à la conscience des croyants: à eux de voir ce que cela leur suggère. Mais les chrétiens doivent évidemment aussi écouter les arguments des autres et éviter de les réduire dans des catégories faciles, que «les autres» soient les requérants d’asile ou les personnes dont les opinions diffèrent des nôtres. L’action de l’Eglise va bien au-delà du terrain suisse, pour remonter aux causes: éviter les conflits au point de départ, ou favoriser le développement pour limiter l’exode de réfugiés dits «économiques».
Les partis de droite ont motivé ce tour de vis de l’asile. Cela vous pose-t-il un problème qu’ils fondent aussi leur politique sur les valeurs chrétiennes (PDC, UDC) ou humanistes (PLR)?
Personne n’est totalement chrétien, nous le savons bien si nous sommes un peu honnêtes vis-à-vis de nous-mêmes. Construire une société d’inspiration chrétienne signifie aussi mettre en évidence une manière chrétienne d’accueillir l’autre, et c’est un des meilleurs moyens de limiter la violence. Vouloir éviter que les procédures se prolongent durant des années, vouloir éviter la violence sont des actes de responsabilité politique et de respect des réfugiés. La seule question est de savoir comment le faire au mieux, étant bien clair qu’il n’y a pas de solution idéale.
Xavier Alonso Berne
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