Pédophilie, Eglise universelle trop lente ?

L'Eglise en  Irlande fut touchée de plein fouet par la crise pédophile. Mgr Diarmuid Martin, archevêque de Dublin, a exprimé son désaccord avec Rome sur le dossier des prêtres pédophiles. Selon Vatican Insider, il ne sera peut-être pas invité à la réunion qui se tiendra au Vatican à propos du douloureux dossier des "prêtres" pédophiles en février prochain.

Ce prélat, au parcours romain pourtant connu, a en effet critiqué publiquement la lenteur du Saint-Siège à résoudre cette question des abus sexuels sur mineurs commis par des membres du clergé.

L'Eglise universelle est une Mère

Il faut savoir que les relations entre les Eglises particulières et le Saint Siège, entre les diocèses et Rome sont parfois une question délicate. Une mauvaise compréhension de l'interaction entre l'Eglise universelle et l'Eglise locale est peut-être la source d'un certain malentendu. Certains considèrent l'Eglise universelle comme une réalité "hors" du diocèse, une nébuleuse très floue aux contours peu précis. On se met alors à parler "d'Eglise suisse", "d'Eglise de France", "d'Eglise irlandaise."

Or, le Cardinal Ratzinger avait déjà explicité que les Eglises particulières naissent de l'Eglise universelle et que leurs relations sont intrinsèques. L'Eglise universelle est présente et agissante dans chaque diocèse. Il faut alors parler d'Eglise en France, en Suisse... Sinon c'est la nationalisation qui prévaut et donc l'appropriation qui finit tôt ou tard par l'emporter.

Rome tantôt oui, tantôt non

Lorsque des sujets touchaient à la liturgie, à la nomination d'évêques, à la catéchèse, chacun avait tôt fait de tirer la couverture à soi pour renvoyer Rome dans ses tranchées, comme une realité hors contexte qui ne comprenait en fait rien à la réalité locale. Alors pourquoi dès qu'il s'est agit de la pédophilie, Rome devrait intervenir ? C'est donc un raisonnement qui poussé dans ses retranchements ne tient pas. Certains diocèses avaient alors tôt fait de renvoyer la patate brûlante à Rome.

Le premier responsable d'un diocèse est l'évêque, et toujours en union affective et effective avec le Pape, le successeur de Pierre, le vicaire du Christ. L'évêque diocésain n'est pas un préfet romain et est effectivement le Pasteur propre de l'Eglise particulière. L'Eglise est faite de diocèses. Ce mystère de commion se reflète dans la prière eucharistique, le canon de la Messe lorsque le prêtre prie en union avec "notre Pape Benoît et notre évêque...". En français, on se contente parfois de dire avec "le Pape", sous entendu celui qui est à Rome, là-bas, assez loin, au-delà des Alpes ... Or le Pape est aussi le Pasteur du diocèse, car il n'y a en fait qu'un seul pasteur de tout le troupeau; le Bon Pasteur est en fait le Christ. Jésus a confié ses brebis à Pierre.

Motu Proprio 2001

Le Motu Proprio de 2001, signé par Jean Paul II, avec la plume du cardinal Ratzinger et de Mgr Bertone (actuellement Pape et Secrétaire d'Etat), eu précisément pour but d'empêcher l'enlisement local. Le Pape s'est rendu compte que des conférences épiscopales, ou des diocèses, aux USA notamment, ne s'en sortiraient pas seuls et sous la houlette du Cardinal Ratzinger, les abus furent alors centralisés à la Congrégation de la foi. L'évêque fut tenu, après une enquête préliminaire, de signaler tous ces crimes à Rome. Mais, dans la pratique, Rome est petit et manque souvent de personnel; aussi il est facile pour une administration diocésaine d'envoyer des informations partielles. Car dans les faits, la Congrégation va s'appuyer de fait sur les forces diocésaines. La Curie romaine et les dicastères romains sont un service rendu aux évêques du monde entier.

Pour paraphraser une parabole de Jésus: il est facile de voir la paille dans l'oeil romain, alors que la poutre diocésaine n'est parfois presque pas visible.