dimanche, 13 juin 2010
Tugdual Derville et les Kiss-in
Kiss-in et autres provocations antichrétiennes. Comment répondre
par Tugdual Derville
vendredi 11 juin 2010
Le niveau des provocations anti-chrétiennes monte. Bien sûr, il n’a rien à voir avec la violence de l’épisode anticlérical de la France du début du siècle dernier, ni avec les persécutions que certains chrétiens endurent aujourd’hui à l’autre bout du monde, sans parler des martyrs de tous les temps. Mais il met les nerfs de certains fidèles à rude épreuve. Des personnes homosexuelles s’embrassent sur la bouche sur le parvis des cathédrales : ces « kiss-in » protestataires, à la fois impudiques, provocateurs et désespérés, entendent forcer l’Église à bénir la relation homosexuelle. Il y a aussi la mobilisation de groupuscules, se prétendant « antifascistes », contre des marches, des prières ou des conférences pour la vie. Même si la mobilisation antichrétienne est ultra-minoritaire, le climat général, sur fond de scandale touchant l’Église, est à la lapidation médiatique.
Comment réagir ? « Faut-il frapper du glaive ? » (Luc 22, 49). C’est la question que posent les disciples quand pointe la persécution.
Toute colère mérite d’être accueillie et méditée. Il s’agit d’en comprendre les racines pour en canaliser l’expression. Nos agresseurs se dévoilent, mais notre réponse révèle tout autant le secret des cœurs. Le généreux mais fougueux Pierre ne supportait pas l’idée de voir son Messie innocent arrêté et exécuté. À l’annonce de la Passion, son refus de cette perspective de défaite humaine entraîne une réplique très vive de Jésus : « Passe derrière moi Satan ! » (Matthieu 16, 23). Un peu plus tard, la riposte tranchante du même Pierre au Jardin des Oliviers, entraînera une autre admonestation du Seigneur : « Rengaine ton glaive ! Tous ceux qui prendront le glaive périront par le glaive » (Matthieu 26, 52). Et de guérir le serviteur du Grand Prêtre que le premier pape venait d’amputer d’une oreille. Il faut faire le rapprochement entre le passage à l’acte violent du chef des apôtres et le reniement qui suivit : Pierre est dépité. Comme il nous est difficile d’accueillir la logique de l’Évangile, cet humiliant « qui-perd-gagne » ! Autant aimons-nous proclamer la fécondité du sang des martyrs d’autrefois – dont celui du premier pape – autant il nous est pénible de voir aujourd’hui l’Église traînée dans la boue.
Bref, les brebis qui subissent tous ces évènements ont besoin d’être rassurées et orientées par leurs pasteurs. L’enjeu est essentiel car c’est au creuset de l’épreuve qu’on vérifie l’or de la foi. C’est quand nous sommes agressés que se manifeste avec le plus d’éclat l’authenticité du message stupéfiant de l’Évangile : aucune compromission avec le mal (aucun masochisme donc, à l’image du Crucifié et son Saint-Esprit), et en même temps un témoignage authentique d’humilité et de douceur. La non-violence bienveillante est susceptible d’ouvrir les cœurs les plus endurcis : « Vraiment, cet homme était le Fils de Dieu » (Marc 15, 39) professe le centurion témoin de l’agonie et de la mort de Jésus. Premier martyr, Étienne suivra l’exemple du Maître avec la même exigence de vérité et de miséricorde.
Nous devons donc bien mesurer le risque des colères nombrilistes qui nous étranglent. Jésus en a averti Pierre : la violence appelle trop souvent la violence. Et tout l’enjeu de l’Évangile est justement d’arrêter ce cercle infernal. La vraie victoire sur le mal vient de la miséricorde.
Trois étapes sont sans doute nécessaires pour ajuster son attitude face aux agressions ou provocations.
Pour commencer, mesurer la portée des attaques. Jusqu’à endurer intérieurement leur caractère blasphématoire. Récemment, des membres de l’Alliance pour les Droits de la Vie, confrontés aux slogans des groupes anarchistes qui voulaient nous faire taire, ont confié avoir mis plusieurs jours à se remettre de l’extrême brutalité de ce qu’ils ont entendu hurler sur la vie, l’Église, et le Seigneur.
Ensuite, bien comprendre que ces attaques visent toujours la Croix : jusqu’à reconnaître que nous en sommes complices, par notre propre péché et que c’est Jésus, et non pas nous, qui les subit innocemment. De quoi nous prémunir contre tout esprit de supériorité vis-à-vis des agresseurs de l’Église.
Et enfin, seulement, se laisser appeler. Appeler à quoi ? Beaucoup au silence, quelques-uns à la parole. Beaucoup à la douceur, quelques uns, peut-être, à la sainte colère, une colère puisée dans le cœur de Jésus et non dans nos impulsions personnelles. Rappelons-nous que Moïse a connu la colère malsaine et meurtrière : écœuré par l’injustice subie par son Peuple, il a tué un Égyptien avant de fuir, puis quarante ans plus tard, d’être envoyé, contre son gré, régler le même problème, avec Dieu cette fois…
À l’école d’un Maximilien Kolbe ou d’une Mère Teresa, nous mesurons la force de l’absolue non-violence. En s’abstenant de regarder la femme adultère que les manifestants tuent déjà du regard, Jésus s’abstrait même de la scène de lynchage. Il dessine dans le sable. Il se montre absent ! Le regard, ce moyen du monde serait, en la circonstance, violent et impudique.
La non-violence n’interdit aucunement une action en justice voire l’emploi de la force pour protéger les faibles. Mais prétendre défendre ses convictions par la force, ou la virulence verbale voire par une présence impudique relève plus certainement du contre-témoignage. Le critère numéro un de l’action ajustée est la paix intérieure.
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