lundi, 02 novembre 2009
Andrea Tornielli corrigé par la salle de presse
Comprenne qui pourra disait Jésus à ceux qui embrasserait l'amour exclusif du ciel pour servir les autres avec un coeur sans partage. C'est bien un drôle et étrange communiqué de presse (en anglais) que le Père Frederico Lombardi (s.j.), directeur de la salle de presse, a publié le samedi 31 octobre. Cela touche à une matière très compliqué (j'ai du lire et relire bien des fois avant de comprendre les conditionnels du subjonctif ... ): le célibat des prêtres, en lien avec la venue des séminaristes anglicans qui souhaitent revenir à la communion catholique.
Tornielli a simplement émis l'hypothèse, en italien, que l'annonce de l'accueil des anglicans par le Cardinal Levada est venu avant la publication du document, et non pas simultanément. Il explique ce retard par une dissension interne à propos du célibat des prêtres. Faux répond la salle de presse, ce retard est simplement dû à des raisons techniques.
Je veux bien, mais il n'y pas besoin d'avoir fait des études pour savoir la lourde pression qui est mise sur Benoît XVI afin d'arriver à l'ordination d'hommes mariés, les fameux "viri probati". Qu'on aille pas me faire croire qu'il n'y a pas des pressions et des fortes tensions entre certains hommes d'Eglises pour supprimer cette loi ecclésiastique qui, selon certains, remonteraient au Moyen Age (or, ce trésor remonte à l'époque des Apôtres).
Donc acte. Comme Andrea Tornielli est très humble, il publie le communiqué de la salle de presse sur son blog (d'ailleurs très visité), ce qui montre la grande classe et la qualité de ce grand journaliste. Il n'a qu'un seul défaut: il est très bien informé...
21:03 | Lien permanent | Commentaires (6) | | |
Commentaires
Sans aucun doute les pressions dont il est question ici sont-elles bien réelles. Mais il convient de préciser que la pression principale provient d'une réalité tragique: la pénurie dramatique de prêtres dans l'Eglise catholique. En Europe, un peu plus d'un tiers des paroisses n'ont plus de prêtre résidant, et donc pas d'eucharistie régulière. La situation est pire en Afrique. La question (je dis bien la question) d'ordonner ou non des viri probati s'impose donc à toute l'Eglise. Elle atterrit à Rome notamment par les rapports alarmants de nombreux évêques en visite ad limina. La présence de prêtres anglicans mariés ne peut manquer de raviver cette question.
Je signale un article intéressant paru dans la revue jésuite La Civiltà cattolica, en 2007. On sait que la revue ne publie rien sans l'accord du Vatican. On trouvera une traduction partielle de cet article sur le site suivant: http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/169450?fr=y
L'article traite avant tout des prêtres "partis" et des prêtres réintégrés. Il contient aussi un alinéa sur la présence, au sein de l'Eglise latine, de prêtres mariés exerçant leur ministère en toute légitimité.
Autant d'éléments à prendre en considération en pensant à la diminution drastique du nombre de prêtres dans notre Eglise.
Que cette réalité fasse pression sur ceux qui ont des décisions à prendre est on ne peut plus normal. On pourrait dire que c'est le souci de toutes les Eglises, comme dit saint Paul, qui exerce une pression, laquelle relève en définitive de la charité apostolique.
Que la question ne soit pas facile à résoudre est également bien compréhensible. Cela explique parfaitement un embarras réel des responsables ecclésiastiques et de leur porte-parole. Un embarras dû non pas à un quelconque cafouillage, mais au poids d'une réalité réellement embarassante, qui ne s'accomode pas de solutions simplistes et tranchées.
Écrit par : Michel Salamolard | mardi, 03 novembre 2009
Cher confrère, vous connaissez comme moi que la possibilité d'ordonner des prêtres mariés dépend uniquement du Saint Père, donc ni des évêques, ni d'un Concile. Mais il y a presque 2000 de Tradition du célibat. Je connais votre position suite à votre interview à la TV Romande sur les enfants des prêtres, au nom du fils. Je vois qu'il y a des pressions. Mais, les échecs et les drames très douloureux ne sont pas des raisons pour ne pas prendre en considération tous les prêtres qui sont devenus saints, car le célibat est source d'équilibre. Aussi, je suis certain que le Pape ne reviendra pas sur cette loi, qui s'appuie sur la réalité. Il peut y avoir des cas particuliers, mais l'exception confirme la règle, qui est comme l'étoile qui brille dans l'obscurité.
Écrit par : Dominique | mardi, 03 novembre 2009
Sans vouloir le moins du monde entrer dans une polémique avec vous, je me permets de d'inscrire les remarques suivantes en marge de votre commentaire, Dominique.
1) Ce qui dépend du Saint-Père actuellement, c'est de donner ou non une dispense de célibat. Il dépend de tout évêque de la demander. Il n'est pas vrai de dire, comme vous le faites, que la question de fond ne dépend ni des évêques ni d'un concile. La meilleure preuve en est que plusieurs conciles se sont prononcé sur le sujet, depuis celui de Nicée jusqu'à ceux de Latran I et II, sans compter Vatican II.
2) Dans mon propos ci-dessus, il ne s'agit nullement des cas douloureux que vous évoquez, c'est un autre problème, mais de la question de fond de l'ordination de viri probati, de l'existence dans l'Eglise latine d'un clergé marié déjà assez nombreux, surtout si viennent s'y ajouter des prêtres anglicans.
3) La question de fond, celle qui embarrasse à juste titre les évêques, le pape et tous les catholiques (espérons-le), celle qui interpelle leur charité apostolique est la dramatique et persistante pénurie de prêtres catholiques, notamment en Europe et en Afrique.
4) La question n'est pas de savoir si et dans quelle mesure le célibat (ou le mariage) est source d'équilibre personnel pour le prêtre, mais si l'on veut ou non donner au peuple de Dieu les pasteurs dont il a besoin, singulièrement pour l'eucharistie, source et sommet de la vie chrétienne.
Ce n'est ni à vous ni à moi de trouver les solutions, (rien ne nous interdit d'en suggérer avec respect), mais il revient au pape et aux évêques d'en décider, à travers la procédure qu'ils jugeront la meilleure, concile ou autre.
Je vous signale aussi qu'une ordination d'un homme marié par un évêque ayant jugé qu'elle s'impose en certaines circonstances est valide, même sans dispense romaine, et a permis à l'Eglise de subsister, par exemple dans l'ex-Tchécoslovaquie.
Je vous trouve plutôt léger de ne pas comprendre l'embarras des évêques et du Vatican, et de leur porte-parole, sur ce sujet et leur difficulté à nous indiquer, à vous et à moi, le bon chemin. Léger aussi de ne pas prendre au sérieux, semble-t-il, le grave dommage que représente pour l'Eglise la tragédie du manque de prêtres.
Bien cordialement à vous.
Écrit par : Michel Salamolard | mardi, 03 novembre 2009
http://lesuisseromain.hautetfort.com/archive/2009/08/27/annee-sacerdotale-et-celibat-du-pretre.html#more
Vous pouvez lire cette note, cela sera enrichissant pour notre débat, Michel.
Le célibat n'est pas une cause du manque de prêtres, en tout cas pas la seule et unique. Ce qu'il manque, c'est la ferveur, la foi, l'enthousiasme et le désir d'avoir des prêtres. Les prêtres naissent comme les champignons, s'il n'y a pas un terrain fertile, qui s'appuie sur la famille, sur des croyants qui vivent de la foi et réchauffent le tissu de l'Eglise, les prêtres ne naîtront pas.
Pour la Tchécoslovaquie, c'était une question de vie ou de mort, sous le régime communiste, un cas très particulier. Il faut savoir que l'Eglise n'a jamais eu le mariage des prêtres, mais en effet l'ordination d'hommes mariés, à qui on demandait de vivre la continence pour le Royaume des cieux.
Enfin, il n'y a aucun embarras à parler du célibat, ni de la part du Pape, ni de la part de l'Eglise. La limpidité de la vie du curé d'Ars, qui sera proclamé patron des prêtres de l'Univers, en cette fin d'année sacerdotale, montre l'orientation de l'Eglise: elle va et apelle vers le sacerdoce avec la certitude que le célibat est un charisme, un don de Dieu, et cela ne changera pas, malgré les groupes de pressions qui cherchent à peser sur ce choix millénaire.
Enfin, comment vivre concrètement tous les jours, si un prêtre n'est pas convaincu de son choix, de la justesse de rester chaste et pur, dans la continence perpétuel, dans un monde hyper-érotisé ? Si un mari n'est pas convaincu de l'indissolubilité du sacrement du mariage, que sa femme est son unique, je ne sais pas comment il fera concrètement pour lui rester fidèle. Saint Thomas d'Aquin dit que rien n'est voulu qui ne sois connu. Si on ne conçoit pas dans son esprit un but clair, soit le célibat, on ne peut pas le vouloir.
Aussi, être apparement absolu dans la défense du célibat sacertodal, n'est pas une étroitesse d'esprit, mais bien une ouverture vers la grâce, une condition pour vouloir aller vers cette réalité. C'est permettre d'être concret.
Certes, cela n'est pas facile, il peut y avoir des chutes, des drames, mais avec Dieu, avec un travail sur soi, et au besoin une aide humaine, tout est possible. On peut toujours revenir à Dieu, il est un Père, le Miséricordieux, le doux-puissant.
Je suis donc convaincu de la justesse spirituelle et anthropologique du célibat du prêtre, sans fanatisme idéologique, car la vie ordinaire et concrète en dépend.
Bien à vous.
Écrit par : Dominique | mardi, 03 novembre 2009
Dominique, je souscris à presque tout ce que vous dites dans votre commentaire (je n'en dirais pas autant du lien que vous indiquez, notamment en ce qui concerne le rôle respectif du pape et des évêques).
Vous avez bien compris, je pense, que je considère tout comme vous le célibat consacré comme un trésor qui enrichit l'Eglise. Loin donc de moi l'idée de le dévaloriser en quoi que ce soit, d'autant plus que je le vis personnellement avec bonheur.
Je vous accorde aussi sans hésiter que l'obligation du célibat n'est pas la seule cause du manque de prêtres. Mais elle est un élément non négligeable du problème. L'article que j'ai cité de la Civiltà Cattolica confirme cette opinion, que d'autres enquêtes ont aussi mises au jour.
Je vous accorde aussi sans hésiter que personne dans l'Eglise n'est embarrassé pour parler du célibat consacré et pour souligner sa valeur.
L'embarras énorme, c'est la pénurie de prêtres.
Vous savez comme moi que la question de l'ordination de viri probati est débattue dans notre Eglise, qu'elle n'est pas taboue.
Que la présence de prêtres mariés dans l'Eglise latine, qui existe déjà et existera encore davantage avec l'arrivée possible de prêtres anglicans, n'offusque en rien le célibat consacré, mais souligne plutôt la liberté de choix qu'il implique.
Ce qui est réellement embarrassant parce que réellement complexe et difficile est à la fois de conserver la tradition catholique en faveur du célibat et de la chasteté totale des prêtres avec la nécessité de recruter un clergé suffisant.
Rien de cela ne met en cause le célibat consacré, mais seulement son obligation canonique (qui est relative puisque des prêtres mariés existent dans l'Eglise latine).
La tradition orthodoxe aussi bien que la tradition latine montre que cette discipline peut connaître une certaine souplesse.
Mais comment discerner les critères d'une souplesse authentique, qui ne soit ni relâchement ni rigidité, voilà ce qu'il n'est pas simple ni facile de déterminer aujourd'hui, compte tenu de situations très différentes dans le monde. D'où un embarras certain, non à parler du célibat, mais à trouver des solutions concrètes.
Vous savez aussi comme moi que la conviction de l'Eglise catholique, réaffirmée à Vatican II, est que le célibat consacré convient hautement à la prêtrise, mais ne lui est pas obligatoirement liée de droit divin. Que l'Eglise s'interroge à ce sujet est donc parfaitement normal, légitime et urgent.
Vous ne pouvez pas laisser entendre que ceux qui posent ou se posent ce genre de question ne sont pas convaincus de la valeur du célibat consacré (qui n'est pas vécu par les seuls prêtres d'ailleurs).
Je pourrais vous retourner la question. Croyez-vous ou non que le célibat consacré représente en soi une assez grande valeur pour être choisi librement par les prêtres qui y sont appelés? C'est bien ce qui s'est passé dans l'histoire de l'Eglise: bien avant d'être imposé, le célibat ou la continence ont été librement choisis... par ceux à qui cela était et est donné, comme dit Jésus.
À ceux qu'intéresse une position officielle sur le sujet, de la part de quelqu'un qui défend le célibat consacré, et montre les raisons de sa convenance (pas de son lien nécessaire) avec la prêtrise, je suggère de lire ces propos du cardinal Hummes: http://web.zenit.org/article-15054?l=french
Il va tout à fait dans votre sens, Dominique, sans pour autant laisser entendre que la prêtrise est impossible sans le célibat.
Écrit par : Michel Salamolard | mardi, 03 novembre 2009
Pour votre question, il est évident que la réponse est positive.
Par contre, il n'y a que le Pape qui peut prendre la décision.
J'avais 3 ans quand le Synode des évêques de 1971 se posa la question d’une adaptation de la forme actuelle du célibat sacerdotale. Le 94,97 % des 202 évêques présents, représentant alors toutes les régions du monde décida de voter la réponse suivante : "Le célibat sacerdotal en vigueur dans l’Eglise latine sera intégralement conservée". La majorité des Pères présents (55%) choisir alors la formule suivante :
"restant sauf le droit du Souverain Pontife, l’ordination presbytérale d’hommes mariés n’est pas admise, même dans des cas particuliers".
(44% des évêques vota un autre texte : "il revient seulement au Pape, prenant en considération le bien de l’Eglise universelle, de concéder l’ordination d’hommes mariés dans des cas particuliers").
Le célibat fut aussi abordé lors du Synode de 1990 sur la formation sacerdotale : beaucoup de Père demandèrent alors que le célibat soit présenté comme un charisme, au lieu d’une discipline. "Le Synode, convaincu que le célibat est un charisme... ne veut laisser aucun doute quant à la ferme volonté de l’Eglise de maintenir le célibat librement choisi et perpétuel pour les candidats à l’ordination sacerdotale dans le rite latin. Le Synode demande que le célibat soit présenté et expliqué dans la plénitude de sa richesse biblique, théologique et spirituelle comme un don... ".
Aussi, il est très claire que le Pape n'est pas au dessus de l'Eglise et que ni un Concile, ni un Synode, ni toutes les pressions et les subtiles argumentations ne pourront changer cette sagesse.
L'argumentation du choix libre est trop subtile pour ne pas voir un réthorique douteuse. Les époux, pour la validité du sacrement, doivent être libre, sinon le sacrement n'est pas valide. Le manque de liberté est une cause de nullité matrimoniale. Nous aussi, prêtres, répondons par 5 fois au moins, lors de l'ordination sacertotale: oui, je le veux, et à la fin même: oui avec la grâce de Dieu. Alors, nous avons le choix, la liberté. Aussi, l'Eglise n'est pas la grande méchante qui nous impose le célibat. C'est une choix libre, intérieur, que personne ne peut susciter de l'extérieur.
Écrit par : Dominique | mardi, 03 novembre 2009
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