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lundi, 27 juin 2011

Vittorio Messori et le dilemme de Medjugorje

Traduction Benoît et Moi

Ces dialogues avec la Vierge Marie.
Le dilemme de Medjugorje

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Vittorio Messori (Corriere della Sera)
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C'était le début des années quatre-vingt, les autoroutes étaient affaires de pays capitalistes, et pour traverser l'Istrie et ensuite descendre vers le sud le long de la côte dalmate, il n'y avait que l'ancienne route nationale, étroite et dangereuse. Alors que j'allais atteindre le but, je tombai sur le poste de barrage de la milice communiste: questions soupçonneuses, perquisitions, saisie de la Bible que j'avais avec moi, avertissement à ne pas faire de «prosélytisme». J'étais parmi les premiers à arriver en cet endroit âpre et éloigné au nom significatif: Medjugorje, au milieu des montagnes. Du bouche à oreille plutôt que par les médias, qui ne donnaient que quelques nouvelles imprécises, j'avais appris qu'un groupe de très jeunes gens affirmaient «voir la Gospa», la Dame, la Vierge Marie. Et que la chose impliquait des foules croissante dans la Yougoslavie orpheline de Tito depuis un an et où la religion était toujours sous surveillance spéciale. Je partis donc, plus que comme dévot, comme journaliste et spécialiste du phénomène des apparitions mariales, comme ami et disciple de l'abbé Laurentin, le plus grand historien de Lourdes, devenu ensuite l'auteur le plus influent sur Medjugorje.

Ainsi, grâce à la promptitude du voyage, j'ai été parmi les rares qui eurent un privilège envié par les millions de pèlerins qui ont ensuite suivi.
Ce qu'ils appelaient "la rencontre" avait lieu au crépuscule, dans la sacristie de l'église moderne et étrange de l'endroit: étrange car énorme, au milieu d'une sorte de steppe désertique et rocailleuse, un immense édifice pour une paroisse pauvre et minuscule, comme par l'intuition que là, des foules allaient accourir. La sacristie était bondée de gens debout, mais parmi les franciscains, il y en avait qui avaient lu la traduction de certains de mes livres et ils me permirent de me mettre au premier rang. Je dus jouer des coudes pour garder ma place, à laquelle je ne voulais pas renoncer: pour la première fois je pouvais assister à un phénomène que je ne connaissais que par des livres et des documents poussiéreux.

Arrivèrent les six jeunes, âgés de 6 à 16 ans, ils commencèrent à prier à haute voix, eux aussi debout. Ils n'avaient pas en face d'eux une statue ou une image, ils regardaient en l'air. Soudain, la prière s'arrêta et, en synchronisation, ils se laissèrent tomber à genoux, le corps mort, avec un tel bruit que j'ai pensé qu'ils s'étaient brisés les rotules. Au lieu de cela, sur les visages des enfants, apparurent les signes d'une transformation énigmatique: ils s'illuminèrent tous avec un sourire et, à tour de rôle, ils commencèrent un dialogue qu'on devinait aux lèvres qui remuaiant, dont nous, spectateurs, n'entendions aucun son.
J'étais là en tant qu'observateur, dûment critique, je ne cédai pas à l'aura de mysticisme qui imprègnait la petite salle bondée, je scrutai les visages des jeunes, à quelques mètres de moi. Ils étaient, comme je le disais, tous les six, agenouillés côte à côte: la vision devait se déplacer, car ils la suivaient des yeux. Je fixai mon attention sur les yeux, notant que tous se déplaçaient en synchronisation et dans la même direction; et pourtant dans cette position, aucun ne pouvait voir l'autre, il était évident qu'ils suivaient «quelque chose» que tous voyaient, et qui se déplaçait dans l'air, devant eux. Même synchronie dans l'alternance de sourires et d'expressions de peine: dans l'entretien, la Dame , si c'était vraiment elle, alternait des paroles d'amour avec des avertissements inquiètants et les enfants répondaient à l'unisson. Mais, comme je l'ai dit, étant donné leur position, il était impossible qu'ils s'épient, ou s'imitent les uns les autres. En parfaite simultanéité, aussi, la fin survint, après environ un quart d'heure. Les six retrouvèrent leur visage habituel, non plus transfiguré, leur voix audible à nous aussi, pour une prière, se levèrent et s'éloignèrent. Ils rejoignirent le franciscain, leur père spirituel, qui les attendaient dans le presbytère, lui firent la relation de la "rencontre" et lui communiquèrent le "message". Ne connaissant pas le Croate, en plus, le dialecte particulier parlé en Herzégovine, je n'ai pas été en mesure de constater de visu ce que m'avaient assuré les religieux. Que les enfants étaient interrogés immédiatement et séparément: la coïncidence de leurs compte-rendus s'ajoutait à la similitude de leurs regards et de leurs mimiques lors de la «rencontre».

Trente ans ont passé depuis ce Juin 1981 où tout a commencé, je ne suis plus retourné en ces lieux, mais je n'ai pas cessé de m'informer et, surtout, de tomber sur des gens qui avaient été là-bas: des gens de tout âge, statut, niveau culturel. Et pourtant, tous protagonistes d'une expérience qu'ils considèrent comme importante et même pour quelques-uns, décisive. J'ai vu des vies transformées, des vocations religieuses épanouies, des pratiques religieuses redécouvertes. Sur la «vérité» de Medjugorje, on ne pourrait pas avoir de doutes, si l'on appliquait le critère énoncé par Jésus lui-même: "Il n'y a pas un bon arbre qui produise de mauvais fruits ... Chaque arbre se reconnaît à ses fruits ... "(Luc 6.43). Trois décennies d'expérience montrent combien a été spirituellement abondante et excellente la récolte produite par cet arbre grandi de manière inattendue dans les Balkans.

Mais à Medjugorje, il s'est produit l'inverse de ce qui s'est passé pour Lourdes ou pour Fatima, où le refus était venu des athées, des laïcistes, des anti-cléricaux. Ici, les deux évêques qui se sont succédés à la tête du diocèse ont pris une attitude de plus en plus négative, jusqu'à parler de "l'une des plus grandes escroqueries de l'histoire de l'Eglise". Là-bas, la défense des apparitions a caractérisé les catholiques conservateurs, tandis que ceux que l'on dit «ouverts» exprimaient des doutes. Ici aussi, les positions sont inversées: ce sont les disciples de Mgr Lefebvre qui nient de façon polémique qu'il puisse s'agir de la "vraie" Vierge, dans les messages où ils voient ce qu'ils appellent "les déviations hérétiques conciliaires". Des croyants publient un dossier intitulé "Medjugorje: tout est vrai". Mais d'autres croyants répondent avec un instant book, "Medjugorje: tout est faux".
Les épiscopats eux-mêmes sont divisés: il y a l'évêque (et même un cardinal, comme celui de Vienne) qui se rend en personne en pèlerinage, et celui qui fait pointilleusement respecter à ses prêtres l'interdiction de Rome d'emmener officiellement des groupes.

Pour le Saint-Siège, Medjugorje est un dilemme déchirant.
D'une part, il reconnaît avec gratitude l'abondance des fruits spirituels, et de l'autre côté il n'oublie le vulnus (coup porté) au droit canon, avec un mouvement mondial combattu par les ordinaires du lieu, auquel il revient de discerner. Au point où on en est arrivé, une désaveu officiel par Rome de la vérité de l'affaire serait une catastrophe sur le plan pastoral. Mais le contraire serait catastrophique: c'est à dire un démenti officiel de la position des deux évêques qui nient sans hésitation le surnaturel et ne parlent pas de miracles, mais d'arnaques et de tromperies. Cela aurait des effets inédits et imprévisibles sur le droit de l'Eglise.
Il n'y a vraiment pas de quoi envier le cardinal Ruini, président de la commission officielle d'enquête: il est possible que même sa longue expérience et sa prudence reconnue ne pas soient en mesure d'élucider cette espèce de "mystère" du rosaire qui semble, en même temps, "joyeux" et "douloureux".

© Corriere della Sera

Commentaires

Le fait que Rome ait accepté que toute Personne le désirant puisse se Rendre a Medjugorje dans le cadre d'un pèlerinage privé malgré les déclarations des évêque du lieu et qu'en plus le pape ait accepté d’ouvrir une enquête sans se ranger directement derrière les deux évêques est déjà une entorse à la loi .

Alors que certaines voix voudraient une Eglise de plus en plus décentralisée ,il est probable que le ciel par Medjugorje nous indique une autre voix et que la loi ne doit pas étouffer l'esprit.

Écrit par : Fred | mercredi, 29 juin 2011

Merci au Suisse Romain d'avoir rapporté cer article objectif de Victorio Messori. Je sais que vous êtes intellectuellement plutôt contre le phénomène de Mejugorjie. Aussi vous faites-là un effort méritoire d'impartialité et d'aide au discernement.

Maintenant vous savez aussi que le cardinal Saraiva Martins préfet de la Congrégation pour le culte divin vient d'exprimer un scepticisme assez virulent à l'endroit du même phénomène. Par souci d'objectivité, il faudrait nous livrer une traduction de son entretien avec un journaliste.

Nous pourrions ainsi juger sur pièces. Rome s'orienterait-elle vers une condamnation ?

En toute simplicité, je vous avouerai que les objections du cardinal m'ont paru faibles, fondées sur des ragots plutôt que sur des faits. La Gospa n'a jamais critiqué l'évêque de Mostar... et ainsi de suite.

Écrit par : Jean Ferrand | vendredi, 01 juillet 2011

Même à l'aéroport de Fiumicino, ai eu l'occasion de parler avec un suisse revenant de Medj. Même dans le train pour Lausanne, je rencontre aussi des fidèles de Medj. Ils m'édifient grandement. Je constate bien les fruits, les grâces, les conversions, les décisions des vocations, tout cela pour moi n'est pas remis en cause. Je réfléchis, je cherche la lumière, accepte le débat... La Messe, la prière, la confession... voilà les sources de toutes grâces.

Ce que j'essaise de dire: on ne peut pas à partir de cette authentiticité, déduire que Medj bénéficie d'apparitions mariales. La cause n'est pas là. Les grâces viennent de l'Eglise, qui est une Mère Immaculée, sans taches, ni rides... Le Christ, Marie et l'Eglise (le Pape) sont trois mystères profondèment unis. Le Credo le dit: je crois en l'Eglise... La Messe, la prière, la confession sont des réalités qu'on doit retrouver en paroisse, et qu'hélas on ne trouve presque plus. Alors je comprends....Car nos paroisses sont comme paralysées par des conseils, des procèdures, des organismes qui semblent étouffer parfois l'Esprit Saint. On a conçu des structures, mais sans penser à l'eau vive.

Je pense enfin que Medj ne bénéficie pas d'apparitions mariales; Il manque la limpidité, les messages sont fades, on crée une sorte d'addiction, les secrets retiennent les foules, le pain pour jeûner peut venir de là car plus consistant.... bref, je sens l'arnaque.... Aussi je préfère me ranger avec les évêques du lieu, critère qui est la sagesse même de l'Eglise pour discerner la véracité des apparitions. La commission mis en place ne va pas aller contre, car Joseph Ratzinger a toujours été sceptique. On n'a fait dire aussi à Jean Paul II des phrases qui ne sont pas siennes. Enfin, dire que l'Eglise ne peut pas juger tant que les apparitions sont en cours, permet de continuer à faire tourner le manège pendant très longtemps, comme un serpent qui se mort la queue, une vice sans fins. Aussi, usons de la prière, allons dans les confessionaux,partout!, adorons le Seigneur dans l'Eucharisitie, redécouvrons la pénitence et le jeûne, C'est là l'essentiel.
La seule vertu que le diable ne peut pas imiter: l'humilité. Le Padre Pio, même victime d'attaques internes de certains "hommes d'Eglise", fut toujours obéissant envers l'Eglise catholique. Soeur Faustine aussi, ses messages avaient été mal traduits et son message central de la divine Miséricorde suspect durant des années, traductions inexactes provoquant la méfiance de certains au Siège de Pierre. Dieu conduit toujours son Eglise, ne la lâche jamais, même avec les imperfections et nos limites, et cela fait 2000 ans que cela dure. La Providence de Dieu, qui se déploie dans l'espace et le temps, ne se trompe jamais dans ses desseins. L'Eglise est à Dieu. J'aime l'Eglise. Donc si l'Eglise dit que: pas d'apparitions!, une foi adulte acceptera tout cela dans l'obéissance. Même Saint Ignace aurait retrouvé la paix 5 minutes après la fin de son ordre des Jésuites. C'est apprendre que le projet de Dieu est un don, pas une propriété.

Si par hasard l'Eglise disait: oui, apparitions! je reverrais mon jugement, car l'Eglise est un grand nous, soit l'intelligence des autres, que j'essaie de suivre de tout mon coeur. Je ne prétends pas atteindre le vrai tout seul. Donc... je ne m'inquiète pas outre mesure. L'Eglise me donne tout. Tel est notre foi, la foi de toute l'Eglise. Elle est la flamme qui brûle derrière les cendres de mes, de nos péchés, de nos obscurités... Confiance donc, espérance même.

Écrit par : Dominique | vendredi, 01 juillet 2011

Merci de votre réponse. Mais je pense sincèrement que vous commettez une erreur de perspective. Il faut bien avoir à l'esprit que nous, les partisans de Medjugorje, nous sommes entièrement soumis au pape, ENTIEREMENT SOUMIS. Si le pape, ou ses mandatés, condamne, nous obéissons immédiatement : les franciscains de Bosnie-Herzégovine, la paroisse de Medjugorje, les 6 voyants principaux et les voyants secondaires, et les 30 millions de sympathisants, au moins, à travers le monde, nous obtempérons comme un seul homme et le pèlerinage sauvage disparaît d'un seul coup. Le désobéissant serait considéré comme un apostat.
Pas question de faire de la résistance comme à San Damiano, ou à Kérizinen, par exemple.
Moi, sympathisant de Medjugorje, je vais vous surprendre : je souhaite cette solution depuis vingt ans et plus.
Le doute permanent est insupportable.
Maintenant, je vais vous poser une question : croyez-vous vraiment que nous, fransciscains, voyants, paroissiens, fidèles et supporteurs innombrables, nous sommes tous des escrocs, des arnaqueurs, des menteurs ? Pouvez-vous nous le dire en face ? Ne serait-ce pas de la calomnie, ou au moins de la médisance ?
Il reste une solution, il est vrai : nous sommes des gogos, des victimes de l'illusion satanique.
Pas étonnant que les voyants ne voient jamais les pieds de la Gospa : elle a les pieds fourchus !
Je ne puis croire que Satan appelle depuis 30 ans, inlassablement, à la conversion, à la confession sacramentelle, à l'eucharistie et à la pénitence.
Je ne puis croire ... mais je reste soumis au pape, comme vous. J'obéirai sans voir. Nous obéirons sans voir.

Écrit par : Jean Ferrand | samedi, 02 juillet 2011

Je n'ai jamais parlé de Satan... Merci pour votre commentaire et notre discussion. Etre soumis au Pape ce fait aussi à travers un évêque. Le regard sur l'Eglise se fait avec deux yeux. Selon le droit, pour un discernement, c'est toujours l'évêque du lieu qui est souverain. Cela fut le cas pour Lourdes, pour Fatima.... Aussi, pour Medj, même chose. Or, les évêques du lieu se sont toujours exprimés. Le Pape a enfin mis sur pied une commission, en fonction de l'ampleur du phénomène. Donc, pas de diabolisation, juste la réflexion. Belle fête du Coeur Immaculée de Marie.

Écrit par : Dominique | samedi, 02 juillet 2011

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